Le gouvernement Harper refuse de révéler combien il en coûtera aux Canadiens pour séparer le commissaire aux élections d'Élections Canada, une mesure à laquelle tiennent les conservateurs, malgré l'avis contraire des experts électoraux.

Le gouvernement affirme que tout le matériel d'information sur les coûts et la logistique du transfert des opérations du commissaire des élections au directeur des poursuites pénales est réservé au cabinet.

Il ne peut donc être dévoilé, malgré une demande d'accès à l'information.

Le déplacement du commissaire aux élections fédérales dans un bureau séparé supervisé par le procureur général est une mesure importante de la controversée réforme de la loi électorale, adoptée le printemps dernier par les conservateurs malgré l'opposition généralisée des experts locaux et internationaux.

Le ministre de la Réforme démocratique, Pierre Poilievre, avait insisté sur le fait qu'elle était nécessaire pour assurer l'indépendance du commissaire par rapport au directeur général des élections (DGE), que les conservateurs accusent d'avoir un biais contre leur parti.

Son opinion n'a pas changé, malgré les avis du commissaire actuel, Yves Côté, et de son prédécesseur, William Corbett, qui ont fait valoir que le commissaire détenait déjà l'autonomie nécessaire pour mener des enquêtes sur les possibles fautes électorales.

MM. Côté et Corbett ont aussi affirmé n'avoir jamais connu d'interférences avec le DGE actuel, Marc Mayrand, ni avec son prédécesseur.

Le DGE administre les lois électorales alors que le commissaire les applique et enquête sur les contrevenants. Le procureur général décide s'il porte des accusations ou non.

M. Poilievre, qui continue de croire à la sagesse de diviser le commissariat, a reconnu mardi que la réforme pourrait engendrer des coûts, assurant que ce n'est pas encore le cas puisque le commissaire est toujours en place.

Si la réforme n'a encore rien coûté aux contribuables, pourquoi le gouvernement garde-t-il secrets les documents sur la question, s'étonne le porte-parole néo-démocrate en matière d'éthique, Ian Angus. «(Poilievre) mène une vendetta personnelle contre l'intégrité d'Élections Canada. Il veut maintenant en cacher le prix aux Canadiens», a-t-il déclaré à la Chambre des communes.

Un ancien DGE, Jean-Pierre Kingsley, s'est montré surpris que l'information sur les coûts de l'opération soit confidentielle. Si c'est considéré comme un secret de cabinet, alors «tout est un secret de cabinet», selon lui.

«Ça défie l'entendement», a-t-il dit en entrevue.

La loi sur ce déplacement du commissaire aux élections fédérales est entrée en vigueur la semaine dernière. Le commissaire et ses 25 employés travaillent toujours dans les mêmes locaux qu'Élections Canada. Ils devraient déménager au début de l'année prochaine, à un coin de rue de leurs bureaux actuels.

La porte-parole du bureau du commissaire, Michelle Laliberté, a indiqué que le déménagement représentera probablement la plus grande dépense. Mais jusqu'à ce que le changement soit complété, il est impossible de deviner le coût total.

La seule autre dépense jusqu'à maintenant a été son embauche pour les communications du bureau, a-t-elle dit.

M. Kingsley prévoit aussi qu'il faudra du nouveau personnel pour gérer le budget et les ressources humaines, notamment, qui étaient jusqu'alors gérées par Élections Canada.