Le NPD presse le commissaire à la protection de la vie privée du Canada d'enquêter sur de possibles violations de la loi dans le traitement de demandes d'accès à l'information concernant l'ancien ministre des Affaires autochtones, Jim Prentice.

La Presse a rapporté hier qu'une liste révélant l'identité de personnes qui ont demandé des détails sur les dépenses de M. Prentice en vertu de la Loi sur l'accès à l'information - dont plusieurs employés des partis de l'opposition à l'Assemblée législative de l'Alberta - a circulé au sein du ministère des Affaires autochtones au cours des dernières semaines.

Cela pourrait contrevenir à la Loi sur l'accès à l'information, la Loi sur la protection de la vie privée et diverses directives du Conseil du Trésor du Canada.

M. Prentice est candidat dans la course à la direction du Parti progressiste-conservateur de l'Alberta et il pourrait devenir premier ministre de la province dès demain s'il remporte la majorité des voix lors du premier tour de scrutin des militants.

Dans une lettre envoyée hier à Daniel Therrien, le commissaire fédéral à la protection à la vie privée, le député néo-démocrate Charlie Angus estime que ces informations sont « très troublantes ».

« Les faits rapportés constituent une infraction à la Loi sur la protection des renseignements personnels. La divulgation de renseignements personnels de citoyens ayant formulé des demandes aussi délicates est inacceptable. »

« Je vous demande donc de mener une enquête afin de découvrir la nature de cette violation des renseignements personnels et de découvrir si son ampleur dépasse ce que les cadres du ministère ont laissé entendre », a-t-il ajouté.

Autre plainte

Les révélations de La Presse ont eu des échos jusqu'en Alberta, hier, où une controverse avait déjà éclaté au sujet du traitement de demandes d'accès à l'information par le même ministère fédéral.

La liste de noms obtenue par La Presse comprend des recherchistes de partis de l'opposition à l'Assemblée législative de l'Alberta de même que celui du directeur provincial de la Canadian Taxpayers Federation (CTF), Derek Fildebrandt. Le nom du chef du Parti libéral de l'Alberta, Raj Sherman, est aussi cité.

Or, la CTF avait déjà maille à partir avec le ministère des Affaires autochtones, qui a répondu à une demande d'accès à l'information de l'organisme au printemps en disant qu'il avait détruit tous les documents concernant les dépenses passées de M. Prentice.

Le Ministère s'est ravisé quelques semaines plus tard, après que la CTF eut obtenu les mêmes renseignements sur des ministres qui ont précédé et suivi M. Prentice. « J'ai finalement reçu plus de 3000 pages sur M. Prentice... Ils m'ont dit que tout cela était une grosse erreur », a lancé M. Fildebrandt.

M. Fildebrandt a lui aussi porté plainte au Commissariat à la protection de la vie privée.

Liens avec les progressistes-conservateurs

Il appert par ailleurs que le directeur de la section de l'accès à l'information du ministère des Affaires autochtones, Kent Glowinski, est un ancien employé et candidat du défunt Parti progressiste-conservateur fédéral. C'est de cette branche de l'actuel Parti conservateur du Canada qu'émane aussi Jim Prentice.

M. Glowinski n'a pas donné suite à nos appels hier. Dans un courriel envoyé en fin de journée, le Ministère a affirmé que le ministre fédéral des Affaires autochtones, Bernard Valcourt, a demandé à son sous-ministre de confier le dossier aux commissaires de la protection de la vie privée et à l'information.

« Le Ministère s'emploie activement à retracer comment cette information, destinée à des fins administratives internes pour l'équipe de l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels, a pu être diffusée publiquement », peut-on lire dans cette déclaration.

Kent Glowinski a reconnu plus tôt cette semaine que la liste de noms avait circulé en dehors du service de l'accès à l'information, mais précisé qu'elle n'avait pu être consultée que par les personnes autorisées à le faire en vertu d'une délégation ministérielle et leurs employés.

Le Ministère a refusé de dire qui, précisément, avait été en possession du document.

Susan Elliott, qui était la patronne de M. Glowinski au PPC à Ottawa à la fin des années 90 et qui a dirigé la campagne à la direction de M. Prentice en 2003 alors qu'il briguait la direction du Parti progressiste-conservateur fédéral (avant qu'il ne fusionne avec l'Alliance canadienne), a affirmé qu'elle n'a pas eu de contacts directs avec son ancien employé depuis des années.

« J'ai toutes les raisons de croire que Kent exercerait ses fonctions de manière éthique et professionnelle », a-t-elle cependant déclaré.