Alors que la bataille des communications s'annonce ardue contre une opposition bien déterminée à faire dérailler le projet Northern Gateway, le gouvernement Harper fait valoir les retombées économiques - et les revenus qu'un tel projet va rapporter au Trésor fédéral - pour faire accepter la construction d'un oléoduc de l'Alberta jusqu'au port de Kitimat, en Colombie-Britannique.

Le NPD a quant à lui promis la mère de toutes les batailles pour empêcher la construction de cet oléoduc de 1200 kilomètres proposé par la société albertaine Enbridge au coût de 7,9 milliards de dollars, estimant que le projet est une «folie» qui constitue une menace pour l'environnement et la qualité de vie des résidants de la province.

Les Premières Nations, qui affirment ne pas avoir été adéquatement consultées, brandissent la menace d'une contestation du projet devant les tribunaux. Leur accord est important, puisque l'oléoduc doit franchir le territoire de plusieurs communautés autochtones.

Si les députés et ministres conservateurs étaient invisibles mardi après la décision du gouvernement fédéral d'approuver le projet controversé, une poignée de députés de la Colombie-Britannique sont sortis de leur mutisme pour le défendre, hier.

La députée Cathy McLeod, qui représente la circonscription de Kamloops-Thompson-Cariboo, a affirmé que la Commission fédérale d'examen environnemental de l'Office national de l'énergie a bien fait ses devoirs en imposant 209 conditions à Enbridge. Le gouvernement a repris à son compte ces conditions.

«Nous avons pris une décision qui s'appuie sur le rapport d'une commission indépendante. Je crois que les Canadiens reconnaissent que nous comptons sur nos ressources naturelles, que ce soit l'industrie forestière ou l'industrie pétrolière, pour financer des programmes comme la santé, des programmes pour nos aînés, et que cela va nous aider à équilibrer le budget», a affirmé Mme McLeod.

«En 50 ans en Colombie-Britannique, il n'y a jamais eu de déversement de pétrole», a quant à lui affirmé son collègue de Kootenay-Columbia, David Wilks.

Mais le chef du NPD, Thomas Mulcair, a déclaré que la carte économique, dans le cas du projet Northern Gateway, «est un argument factice». «Il y a les aspects environnementaux. Il y a les aspects sociaux. Il y a les aspects économiques. Mais M. Harper fait fi de tout ça. Lui croit que si on arrache le plus rapidement possible dans l'état le plus brut possible une ressource naturelle pour l'exporter vers un autre pays, que ça, c'est une activité économique», a dit M. Mulcair.

Le chef du Parti libéral, Justin Trudeau, a demandé au premier ministre de revenir sur sa décision. «Contre vents et marées, le premier ministre a approuvé le projet d'oléoduc Northern Gateway. Non seulement les considérations environnementales et l'opinion des communautés autochtones n'ont pas été prises en considération, mais le risque est énorme pour l'économie côtière de la Colombie-Britannique. Ce n'est pas le bon endroit pour un oléoduc», a-t-il dit.

Les Canadiens divisés

Un sondage publié hier par la firme Angus Reid Global démontre que les Canadiens sont divisés sur la décision du gouvernement Harper d'approuver le projet Northern Gateway. Seuls 37% des répondants estiment qu'il s'agit de la bonne décision, comparativement à 34% qui sont d'avis contraire et 29% qui disent ne pas savoir. Le sondage a été réalisé en ligne auprès de 1773 internautes les 17 et 18 juin.

Des doutes sur Keystone

Le gouvernement canadien devrait envisager un «plan B», au cas où le pipeline Keystone XL ne serait pas approuvé par le gouvernement américain, estime Raymond Chrétien, qui a été ambassadeur du Canada à Washington de 1994 à 2000.

M. Chrétien participait hier à un échange public avec le nouvel ambassadeur américain au Canada, Bruce Heyman, devant le Conseil des relations internationales de Montréal.

«Si j'étais ambassadeur à Washington, je dirais à mon gouvernement: j'ai vu dernièrement de nombreux signes qui me font envisager un possible refus. Il y a eu par exemple le décret pour diminuer la pollution des centrales au charbon, qui me donne à penser qu'Obama veut que l'histoire voie en lui un président vert. Je dirais qu'il est temps de penser au plan B.»

M. Heyman n'a pas réagi au commentaire de M. Chrétien. Auparavant, il avait affirmé que la prolongation du processus d'approbation du pipeline était due au nombre élevé de commentaires reçus (3 millions) et à une contestation judiciaire au Nebraska.

Le pipeline sera évalué «sous tous les angles possibles», a dit M. Hayden, quand La Presse lui a demandé si le souhait de certains groupes environnementaux de ralentir le développement des sables bitumineux pourrait influencer la décision du gouvernement américain.

- Mathieu Perreault