Le NPD pourrait mettre l'unité des troupes libérales de Justin Trudeau à rude épreuve d'ici quelques semaines en forçant la tenue d'un vote à la Chambre des communes sur une motion réaffirmant sans équivoque le droit des femmes à l'avortement.

Une motion en ce sens a été déposée jeudi soir par la députée manitobaine Niki Ashton le jour même où des milliers de manifestants pro-vie ont envahi la colline parlementaire. Elle a aussi été déposée 24 heures après que le chef libéral Justin Trudeau eut annoncé que tous les futurs candidats de son parti devront être pour le libre choix de l'avortement.

Cette décision du chef libéral a causé une certaine commotion dans le parti, d'autant plus qu'une poignée de députés libéraux s'opposent à l'avortement, notamment les députés John MacKay et Kevin Lamoureux, et que M. Trudeau n'a pas consulté ses troupes avant de prendre une telle décision.

La directive ne s'applique pas aux députés libéraux qui siègent aux Communes, mais seulement aux autres candidats qui porteront les couleurs du parti. Mais elle risque de barrer la route à d'anciens députés libéraux défaits au scrutin de 2011, comme Dan McTeague, Joe Volpe et Gar Knutson, qui s'opposent à l'avortement et qui tentent de faire un retour en politique.

Recrutement

Elle pourrait aussi compliquer les efforts de recrutement du Parti libéral. Des stratèges libéraux courtisent depuis quelque temps le maire de Saguenay, Jean Tremblay. Mais ce dernier a une position tranchée sur l'avortement, qu'il a déjà décrit comme «un crime et un meurtre».

En 2012, les militants libéraux ont adopté lors d'un congrès national une résolution appuyant explicitement le droit des femmes à se faire avorter. M. Trudeau s'est aussi dit «résolument pro-choix».

Mais pour le NPD, la directive de M. Trudeau a pour effet de créer une politique sur l'avortement à deux vitesses: une pour les députés actuels et une autre pour les autres candidats libéraux. Une motion permettrait de déterminer à quelle enseigne logent les libéraux et les conservateurs sur cette délicate question.

«Le NPD est un parti pro-choix. Tous mes collègues sont unanimes: il appartient à la femme seule de prendre les décisions en regard à sa santé. Notre position est claire et sans équivoque, et les autres parlementaires auront l'occasion de passer de la parole aux actes», a affirmé Mme Ashton dans une entrevue accordée à La Presse.

La motion qu'elle a déposée se lit comme suit: «Que, de l'avis de la Chambre: le droit des femmes de choisir l'avortement est au coeur de l'égalité et touche aux droits de la personne, qu'on soit au Canada ou ailleurs dans le monde.»

La motion invite aussi le gouvernement Harper, en prévision du sommet international sur la santé des enfants et des mères qui aura lieu du 28 au 30 mai, à «abandonner sa politique qui consiste à refuser de financer les programmes internationaux qui soutiennent les diverses options de planification de la famille et de santé en matière de procréation, y compris l'avortement».

Pour l'heure, on ignore quand cette motion sera mise aux voix étant donné qu'il s'agit d'une motion parrainée par une députée et non par un parti. Mais des stratèges ont indiqué à La Presse que le NPD n'écarte pas l'idée de la reprendre à son compte au cours d'une journée de l'opposition qui lui revient d'ici la fin de la session parlementaire, afin de forcer un débat et un vote sur le sujet au cours des prochaines semaines.