Le gouvernement fédéral a déjà défendu en cour une mesure qu'il compte interdire par sa réforme électorale.

Ottawa a remporté une cause devant le plus haut tribunal de la Colombie-Britannique contre trois résidants de la province qui, à la suite des élections de 2008, voulaient faire déclarer inconstitutionnelles les changements apportés aux règles d'identification des électeurs apportés l'année précédente.

Ironie, le gouvernement a alors défendu une mesure qui ne sera plus valable si le projet de loi c-23 est adopté.

La cause pourait se retrouver devant la Cour suprême.

Les avocats fédéraux avaient alors plaidé en faveur des règles permettant à un électeur n'ayant pas en sa possession les documents d'identification requis de pouvoir voter grâce à un garant. Ils ont soutenu que ces changements aux règlements étaient une garantie pour les citoyens qui n'ont pas les preuves d'identité appropriées de pouvoir voter.

Or, les conservateurs ont présenté un important projet de loi, le C-23 ou loi sur l'intégrité des élections, qui éliminerait carrément la possibilité de se porter garant d'un électeur qui n'a pas tous les documents requis. Des experts jugent que cette mesure va priver des dizaines de milliers de personnes de leur droit de vote aux prochaines élections générales, en 2015. Les experts constitutionnels sont aussi défavorables.

Président d'une commission royale sur la réforme électorale en 1992, Pierre Lortie a témoigné devant un comité de la Chambre des communes la semaine dernière. Il a affirmé que l'élimination du garant «contrevient sans aucun doute à la Charte canadienne des droits et libertés».

L'avocat Brent Olthuis, qui représente les trois demandeurs de la Colombie-Britannique, souligne la contradiction dans la façon de faire du gouvernement dans sa demande d'audience à la Cour suprême du Canada.

«Peu importe si le projet de loi est adopté ou non, ce dossier offre à la cour l'opportunité d'offrir un accompagnement au Parlement - et, par le fait-même, aux législatures provinciales et au débat public - sur les enjeux constitutionnels soulevés par la loi sur l'identification des électeurs et sur la façon de rédiger des lois constitutionnelles en la matière», écrit Me Olthuis.

La Cour suprême n'a pas encore donné de réponse à cette demande d'audience.

Les trois clients de l'avocat ont perdu leur cause devant les tribunaux inférieurs. Bien qu'un tribunal ait déclaré que les exigences d'identification de 2007 contrevenaient effectivement à la Charte des droits et libertés, il a jugé que cette mesure était justifiée pour prévenir la fraude électorale. Cette décision a été maintenue en cour d'appel.

Avant 2007, les électeurs n'étaient pas tenus de fournir des pièces d'identité pour voter, tant que leur nom figurait sur la liste électorale. Le fait que les électeurs ne possédant pas les documents nécessaires puissent trouver quelqu'un pour se porter garant de son identité prouvait que les nouvelles règles «compromettaient minimalement» le droit de vote, ont dit les avocats fédéraux.