Les immigrants devront habiter plus longtemps au Canada et payer plus cher pour obtenir leur citoyenneté canadienne, a annoncé jeudi le ministre fédéral de l'Immigration, Chris Alexander.

Dans un projet de loi déposé à la Chambre des communes, le gouvernement Harper veut imposer aux demandeurs d'être présents physiquement au Canada pendant au moins quatre années sur une période de six ans. À l'heure actuelle, l'exigence de résidence est de trois ans sur quatre, et cette « notion de résidence n'est pas définie », a précisé le gouvernement.

Dans ce qu'il a décrit comme « la première réforme en profondeur de la Loi sur la citoyenneté depuis 1977 », le ministre Alexander souhaite aussi faire passer les frais d'une demande de citoyenneté de 100 à 300 $.

Les autres changements incluent une procédure simplifiée pour révoquer cette citoyenneté pour des personnes reconnues coupables d'actes commis contre l'intérêt national du Canada (terrorisme, espionnage ou acte de guerre, entre autres). Des sanctions plus sévères sont prévues pour des déclarations frauduleuses dans le but d'obtenir le statut de citoyen canadien. Enfin, le ministre espère qu'une procédure améliorée du système de traitement permettra de réduire les délais d'attente et d'abolir l'arriéré des demandes.

La réforme a reçu un accueil partagé. À Québec, la ministre de l'Immigration Diane De Courcy a dit vouloir analyser si les changements proposés respectent les champs de compétence de la province. « Je constate une fois de plus que l'approche du gouvernement fédéral en matière de citoyenneté diffère sensiblement de l'approche québécoise en ce domaine », a-t-elle fait valoir par la voie d'un porte-parole.

À Ottawa, la députée du NPD Lysane Blanchette-Lamothe a dit avoir « des inquiétudes et j'ai des satisfactions ». Elle s'est dite satisfaite que le gouvernement tente de régler une fois pour toutes la question de Canadiens nés avant 1947 et qui ont été dépossédés de leur citoyenneté en raison de contradictions dans les règles.  

 

Elle s'est par contre dite préoccupée du nombre croissant de pouvoirs discrétionnaires accordés au ministre et de la possibilité que la souplesse accrue de la révocation de la citoyenneté puisse être inconstitutionnelle.

La réaction du chef libéral Justin Trudeau a été moins positive. « Les conservateurs démontrent coup après coup que l'immigration n'est pas leur priorité, a-t-il dénoncé. J'ai beaucoup d'inquiétude par rapport à ce projet de loi, que nous allons étudier en profondeur. On est dans un monde où nous devons faire compétition pour des immigrants qualifiés, contre les États-Unis, l'Australie, la Grande-Bretagne. Et de mettre plus de barrières comme les conservateurs le font, ce n'est pas à notre avantage. » 

Le Conseil canadien pour les réfugiés a lui aussi exprimé de sérieuses préoccupations : « Traiter les personnes à double nationalité de façon différente est discriminatoire et viole le principe fondamental selon lequel tous les citoyens sont égaux », a déclaré la présidente, Loly Rico.

- Avec Marie-Michèle Sioui