Ulcéré de recevoir par la poste un dépliant du NPD prônant l'abolition du Sénat - « une institution coûteuse et antidémocratique » -, le sénateur conservateur Jean-Guy Dagenais a expédié vendredi une virulente riposte à la députée de sa circonscription de Terrebonne-Blainville Charmaine Borg.

« Quel torchon! Voilà le seul mot qui me vient à l'esprit pour qualifier le dépliant que vous faites parvenir aux citoyens du comté aux frais de tous les contribuables canadiens », a écrit d'emblée M. Dagenais, nommé au Sénat par le premier ministre Stephen Harper en janvier 2012.

L'ancien policier de la Sûreté du Québec a mal digéré cette nouvelle attaque du NPD contre le Sénat, éclaboussé depuis des mois en raison du scandale des dépenses des sénateurs Mike Duffy, Patrick Brazeau, Pamela Wallin - tous nommés par Stephen Harper - et l'ancien sénateur libéral Mac Harb.

 M. Harper est mitraillé de questions aux Communes par le chef du NPD Thomas Mulcair depuis six mois dans la foulée des révélations voulant que des proches collaborateurs du premier ministre ont joué un rôle dans les tractations qui ont mené au remboursement des dépenses injustifiées de Mike Duffy.

À ce sujet, M. Dagenais estime dans sa lettre, qui a été envoyée à tous les députés et sénateurs, que M. Mulcair fait « perdre du temps » à la Chambre des communes en posant des questions sur cette affaire alors qu'il y a d'autres priorités plus importantes comme l'économie, selon lui.

« Comme députée NPD, qui n'aurait probablement jamais été élue sans une spontanée sympathie des Québécois pour Jack Layton, qui avait désigné des poteaux pour boucher les trous dans plusieurs circonscriptions de la province, savez-vous que l'abolition du Sénat, dont vous parlez, ne fait même pas partie du programme du NPD? Et définitivement que vous ne connaissez rien en matière constitutionnelle pour écrire de telles allégations. Il y a une bibliothèque bien garnie sur le sujet, à votre disposition, dans le Parlement et je vous suggère de vous en servir », a encore écrit M. Dagenais dans sa missive.

Le NPD prône l'abolition du Sénat depuis 50 ans et a promis de tenir un référendum sur ce sujet aux élections de 2011.

M. Dagenais a poursuivi sa lettre en disant espérer que les résultats des élections partielles du 25 novembre seront le présage des élections générales qui auront lieu dans deux ans. Durant les partielles qui ont eu lieu dans quatre circonscriptions, le NPD n'a pas réussi à arracher les bastions  de Bourassa et Toronto-Centre aux libéraux ou encore les comtés de Provencher et Brandon-Souris aux conservateurs.

Le sénateur conservateur a aussi affirmé avoir été « maintes fois » sollicité par des citoyens et des organismes du Québec. « Lorsque je leur proposais d'aller voir d'abord leur député, ils m'ont tous répondu que vous étiez inutiles et impuissants pour faire avancer les choses. Prenez-en note et dites-le à vos collègues. Dites-leur même que ça m'a fait un certain plaisir d'entendre ça », a-t-il dit.

« La vie parlementaire, madame Borg, ce n'est pas juste le chialage dans lequel vous êtes passés maîtres et dont se délectent les médias. Les Canadiens et une grande majorité de Québécois reconnaissent que nous avons une économie en santé grâce aux Conservateurs et ils continuent et continueront certainement de rejeter vos idées socialistes », a-t-il ajouté.

Avant d'être nommé au Sénat, M. Dagenais avait été candidat du Parti conservateur dans Saint-Hyacinthe-Bagot. Il a terminé troisième, ne récoltant à peine 16 % des voix, loin derrière la néo-démocrate Marie-Claude Morin (52,3%).

L'envoi de cette lettre a provoqué la colère dans les rangs du NPD. Le leader parlementaire du NPD à la Chambre des communes, Nathan Cullen, a d'ailleurs soulevé cet après-midi un rappel au règlement pour dénoncer cette attaque contre Mme Borg, élue avec une près de 50 % des voix aux élections de 2011.

« Le ton de cette lettre est offusquant, a affirmé M. Cullen, s'élevant contre cette attaque « paternaliste, enfantine, condescendante et franchement mysogine ».

« Le sénateur Dagenais a été rejeté par les électeurs lors de l'élection de 2011 pour ensuite être nommé au Sénat par le premier ministre. Il est non élu, non responsable et sous enquête. Du haut de son piédestal de légitimité, cet homme a utilisé son bureau sénatorial, son titre et les ressources des contribuables pour lancer des attaques vicieuses et personnelles contre la députée dûment élue de Terrebonne-Blainville. (...) Cet homme est un législateur fédéral, mais pas parce que les électeurs l'ont élu. Il occupe ce poste simplement parce qu'il a été un partisan militant du Parti conservateur du Canada.

 Joint vendredi, M. Dagenais a reconnu que le ton de sa lettre était « musclé ». Mais il a soutenu qu'il a l'intention de défendre l'institution qu'est le Sénat devant les nombreuses attaques du NPD.