L'heure est venue pour les Canadiens de se prononcer sur l'avenir du Sénat, estime le ministre d'État aux petites entreprises Maxime Bernier.

M. Bernier réclame ainsi la tenue d'un référendum national sur l'abolition de la chambre haute. Ce référendum devrait avoir lieu au printemps 2014.

Dans une entrevue accordée à La Presse, hier, M. Bernier a soutenu qu'il s'agit d'une idée personnelle qui reflète à la fois l'opinion des commettants de sa circonscription de Beauce et d'un nombre grandissant de militants conservateurs, qui sont réunis à Calgary jusqu'à samedi soir pour le congrès national de leur parti.

Le Sénat est devenu un véritable boulet au pied du gouvernement conservateur en raison du scandale des dépenses de certains sénateurs - Mike Duffy, Pamela Wallin et Patrick Brazeau, qui ont tous été nommés par le premier ministre Stephen Harper.

«Notre gouvernement a demandé à la Cour suprême du Canada il y a quelques mois de nous donner son opinion sur la manière de réformer le Sénat ou comment l'abolir. Je pense qu'il est temps de demander aux Canadiens quoi faire avec le Sénat, de le réformer ou de l'abolir», a expliqué M. Bernier.

«C'est ma position personnelle. J'aimerais que mon gouvernement le demande aux Canadiens au printemps prochain par le biais référendum pancanadien. Je pense qu'il serait tout à fait légitime que l'on demande aux Canadiens ce qu'ils pensent du Sénat après 146 ans d'existence», a ajouté le ministre.

M. Bernier devient ainsi le premier ministre du cabinet Harper à réclamer une telle consultation populaire sur le Sénat. Plus tôt cette semaine, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a dit être un apôtre de l'abolition de la chambre haute, mais il n'est pas allé jusqu'à réclamer un référendum.

L'ancien chef par intérimaire de l'Alliance canadienne, John Reynolds, appuie l'idée de tenir un référendum sur l'abolition du Sénat. M. Reynolds, qui a été député de la région de Vancouver aux Communes pendant plusieurs années et conserve une influence au sein du mouvement conservateur dans les provinces de l'Ouest, estime que le Sénat n'a plus d'utilité.

«Je suis totalement d'accord avec cette idée. C'est évident qu'on ne peut pas le réformer. Le premier ministre doit laisser la population décider cette question. S'il le fait, les gens vont lui dire que le Sénat ne sert vraiment à rien», a dit M. Reynolds à La Presse.

Réforme ou abolition

Pour abolir le Sénat, le gouvernement fédéral doit obtenir le consentement unanime des provinces. Mais si une majorité écrasante des Canadiens appuie l'idée de mettre la clé sous la porte de cette institution par voie référendaire, cela pourrait forcer la main aux provinces récalcitrantes.

Depuis 2006, le gouvernement Harper tente d'adopter une réforme qui permettrait d'élire les sénateurs et de limiter leur mandat à neuf ans. Mais certaines provinces, dont le Québec, ont contesté cette réforme parce qu'Ottawa agissait de manière unilatérale. La Cour d'appel du Québec a donné raison au gouvernement du Québec. Dans son jugement, le tribunal a statué que le gouvernement fédéral doit obtenir le consentement des provinces avant d'aller de l'avant.

Avant même d'obtenir la décision de la Cour d'appel du Québec, le gouvernement Harper a soumis un renvoi au plus tribunal du pays pour obtenir son avis sur la constitutionnalité de sa réforme. Il a aussi profité de l'occasion pour lui demander la formule à suivre pour abolir le Sénat.

Une question simple et claire

Selon plusieurs experts, dont Tom Flanagan, ancien proche collaborateur de Stephen Harper, la Cour suprême du Canada devrait essentiellement reprendre le jugement rendu par la Cour d'appel du Québec.

«Depuis 2006, nous tentons de réformer le Sénat, mais nous rencontrons beaucoup de difficultés. [...] Moi j'aimerais qu'on pose aux Canadiens une question simple et claire pour avoir une réponse claire: est-vous en faveur de l'abolition du Sénat, oui ou non? De cette manière, cela ferait en sorte de légitimer ce que l'on veut faire», a affirmé M. Bernier.

Le ministre a ajouté que les provinces ont aboli leur Sénat et que la démocratie s'y porte bien. D'autres pays l'ont aussi aboli comme la Suède ou le Danemark. Il a ajouté que la Chambre haute est marquée par la partisanerie et coûte cher aux contribuables, soit 100 millions par année.