Le sénateur Patrick Brazeau dit avoir rejeté une offre faite par le gouvernement, qui lui aurait évité la suspension sans salaire jusqu'aux prochaines élections fédérales.

Le sénateur Brazeau qui, aux côtés de Mike Duffy et de Pamela Wallin, fait face à une motion pour le suspendre, a révélé vendredi après-midi que Claude Carignan, le leader du gouvernement au Sénat, lui avait fait une offre en matinée.

En plein débat sur les suspensions et devant des sénateurs ébahis, M. Brazeau a raconté que M. Carignan, dans un couloir donnant sur la porte arrière de la chambre, lui avait dit que s'il présentait des excuses et admettait sa responsabilité, sa punition serait moindre.

Au départ, M. Carignan n'a pas nié les propos de son ex-collègue conservateur. Il a dit qu'il l'avait fait par affection pour M. Brazeau.

«J'ai parlé au sénateur Brazeau en toute amitié (...) Je l'ai fait en toute confiance pour l'aider», a admis M. Carignan au cours du débat.

«J'avais peut-être l'envie de trop aider. J'ai peut-être commis une erreur en lui parlant», a dit M. Carignan.

M. Brazeau, lui, a plutôt étalé sa colère. «Je n'ai rien fait de mal», a-t-il lancé avant de quitter le Sénat.

Lorsqu'il est sorti à son tour, M. Carignan a nuancé son admission. «Je lui ai dit propose quelque chose», a-t-il précisé, assurant qu'il n'avait rien offert en retour.

Mais voilà que M. Carignan, qui affirmait la semaine dernière qu'il fallait à tout prix punir sévèrement les trois sénateurs à qui on reproche des dépenses illégitimes, nuance aussi son attaque.

Il parle maintenant de «consensus» nécessaire «pour avoir une sanction appropriée».

«Moi, je pense que ça prend des suspensions sans salaire, mais à quel niveau? On verra (à) six mois, dix mois, un an, deux ans et demi (...)», a-t-il proposé.

Et ce sont les sénateurs Wallin et Brazeau qui devraient bénéficier de la clémence de leurs collègues, selon M. Carignan, parce que ce sont ces deux-là «qui ont fait valoir le plus leur point de vue et présenté des preuves pour réduire (les sanctions)».

L'ouverture de M. Carignan ne s'étend donc pas au sénateur Duffy, qui a lancé une attaque en règle contre Stephen Harper, mardi. C'est justement le cas de M. Duffy, dont les dépenses de 90 000 $ ont été remboursées par le chef de cabinet du premier ministre, qui a conduit ce scandale aux portes de M. Harper.

Aucune note interne sur cette nouvelle ouverture affichée par le leader conservateur au Sénat ne semble avoir circulé dans les rangs conservateurs, puisqu'en fin de journée, le sénateur Jean-Guy Dagenais maintenait qu'il s'en tiendrait au «plan de match initial». Il a indiqué avoir l'intention de voter pour suspendre les trois sénateurs sans salaire jusqu'à la fin de la session parlementaire, probablement en 2015.

«J'espère que tout le monde prendra quelques jours pour bien penser à tout ça», a conseillé Mme Wallin en quittant le parlement, vendredi soir.

M. Duffy, lui, était absent du Sénat vendredi.

Le gouvernement conservateur, qui n'avait peut-être pas prévu que l'affaire traînerait aussi longtemps, cherche maintenant à mettre fin au débat sur la suspension sans salaire des trois sénateurs.

Une motion qui sera déposée lundi devrait accélérer le processus et un vote sur les motions pourrait avoir lieu mardi ou mercredi.

Mais le gouvernement n'est pas au bout de ses surprises. Le sénateur Don Plett, un des deux conservateurs qui ont offert un plaidoyer contre les motions, les trouvant injustes, présentera un amendement lundi. On ne sait pas encore quel en sera le contenu.

Le sénateur Dagenais, qui en début de semaine disait qu'il fallait mettre le couvercle sur le scandale des dépenses des sénateurs, a admis vendredi matin que la tâche était moins facile que prévu. «Quand on met le couvercle sur la marmite et que ça bouille, des fois, c'est un peu plus difficile», a-t-il remarqué.

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Claude Carignan