Le Québec joint sa voix à la grande majorité des provinces en affirmant que le gouvernement Harper ne peut réformer le Sénat sans obtenir leur consentement.

Dans un mémoire soumis à la Cour suprême du Canada cet après-midi, le procureur général du Québec soutient que la réforme proposée par le gouvernement Harper - limiter le mandat des sénateurs à huit ans et nommer des sénateurs élus dans les provinces où il y a des vacances - doit être avalisée par au moins sept provinces représentants 50 % de la population.

« Le remplacement du mandat actuel, dont le terme est l'âge de la retraite, par un mandat à durée déterminée altère l'une des caractéristiques fondamentales du Sénat et, à cet égard, ne peut se faire qu'en vertu de l'article 38 de la la Loi constitutionnelle de 1982, c'est-à-dire par proclamation du gouverneur général autorisée par résolution du Sénat, de la Chambre des communes ainsi que par une résolution des assemblées législatives d'au moins les deux tiers des provinces dont la population confondue représente 50% de la population de l'ensemble des provinces (la procédure dite du« 7/50 ») », soutient le Québec dans son mémoire.

On invoque le même argument pour ce qui est de l'élection des sénateurs. « L'introduction d'un processus électoral de sélection des sénateurs a également pour conséquence de modifier une des caractéristiques fondamentales du Sénat - le caractère non électif de leur charge - modification qui ne peut être faite qu'en vertu de l'article 38 de la Loi constitutionnelle de 1982.»

D'ailleurs, le Québec rappelle que la Cour suprême du Canada s'est déjà prononcée sur les pouvoirs du Parlement d'apporter des changements au Sénat sans l'accord des provinces en 1980 dans le cadre d'un autre renvoi.

« De façon générale, la Cour a nié la capacité du Parlement fédéral de réformer le Sénat sans l'accord des provinces lorsque les modifications nécessaires à cette réforme altèrent les caractéristiques fondamentales de cette chambre du Parlement. La Cour a rappelé quel était le rôle particulier du Sénat au sein du Parlement et quels étaient les attributs particuliers qui lui ont été conférés - les caractéristiques fondamentales - pour lui permettre de remplir ce rôle. Elle a notamment indiqué que le Sénat a pour mission de protéger les intérêts des régions ainsi que ceux des provinces.

Incapable de faire accepter sa réforme du Sénat par les provinces, le gouvernement Harper a décidé de faire appel à la Cour suprême du Canada au printemps afin de trancher la question une fois pour toutes. Par la même occasion, le gouvernement conservateur a demandé au plus haut tribunal du pays d'indiquer la formule à suivre pour abolir le Sénat s'il ne peut aller de l'avant avec les changements qu'il préconise.

À cet égard, le Québec, à l'instar des autres provinces, estime qu'Ottawa doit obtenir le consentement unanime des provinces avant de mettre la clef dans la porte de la Chambre haute.

La Cour suprême du Canada doit entendre les arguments des différentes parties de ce dossier à la mi-novembre.

Au moins trois provinces - Manitoba, la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse - réclament l'abolition du Sénat, a fortiori depuis que le scandale des dépenses des sénateurs a éclaté au grand jour au printemps. Sur la scène fédéral, le NPD est le seul parti fédéraliste à réclamer ouvertement l'abolition de cette institution.

Cette semaine, le chef du NPD, Thomas Mulcair, a d'ailleurs sillonné le pays afin de rallier de les Canadiens à la proposition du NPD.