Craignant qu'il y ait encore de la fraude électorale lors des quatre élections complémentaires qui auront lieu bientôt, le Parti libéral dénonce l'inaction du gouvernement conservateur et lui demande d'agir en faisant rapidement adopter une loi pour mieux protéger les électeurs.

Mais le Nouveau Parti démocratique croit justement qu'en prorogeant le Parlement - comme il a l'intention de le faire - le gouvernement retarde indûment l'adoption d'une telle loi.

En mai dernier, la Cour fédérale a conclu que les élections de 2011 avaient été entachées, en raison d'appels frauduleux faits à des citoyens, leur indiquant faussement que leur bureau de vote avait été déplacé, souvent très loin de chez eux. La manoeuvre en aurait découragé plus d'un d'aller voter.

Et il apparaît que ces appels auraient visé des électeurs qui avaient auparavant exprimé une préférence pour un parti d'opposition, notait alors le juge Richard Wosley dans sa décision qui n'avait toutefois pas invalidé le résultat du scrutin dans les six circonscriptions visées.

Et le juge n'a pas non plus conclu que le parti de Stephen Harper avait mal agi, mais retenait que la base de données du Parti conservateur était la source de la fraude et avait été utilisée à cette fin.

En point de presse mercredi, le député libéral Ralph Goodale a indiqué que le premier ministre n'avait rien fait depuis pour prévenir de tels abus. Et qu'il n'avait ni fourni d'explications au sujet de l'utilisation de sa base de données, ni appelé la Gendarmerie royale du Canada pour qu'elle agisse si la base de données avait été volée.

Le Directeur général des élections a déjà enjoint le gouvernement à mettre en oeuvre une série de mesures, et cela, avant le début de 2014 pour qu'une nouvelle loi soit en vigueur à temps pour les élections de 2015.

Bien que le délai soit «très serré», et que la prorogation du Parlement retarde tout, M. Goodale croit que si le gouvernement le souhaite, il peut même faire adopter une loi à temps pour les élections complémentaires.

«Si le gouvernement veut le faire, il est en mesure de le faire», croit-il.

«Et un geste comme cela ferait beaucoup pour améliorer notre démocratie», ajoute-t-il.

Si une loi n'est pas adoptée à temps, la dénonciation de la situation faite à nouveau par les libéraux mardi aura au moins pour effet de mettre la population en garde, juge M. Goodale. Ainsi, lors des élections partielles, si des électeurs reçoivent des appels trompeurs comme en 2011, ils sauront qu'ils doivent conserver les messages et contacter immédiatement le Directeur général des élections, indique le député libéral.

«On doit être vigilants: cette situation peut se reproduire», insiste M. Goodale.

Mais le gouvernement affirme ne pas éviter le problème et dit s'être engagé à présenter un projet de loi pour régler ce problème, afin de s'assurer que les Canadiens maintiennent confiance dans l'intégrité du processus électoral.

«En temps voulu, notre gouvernement présentera des modifications législatives importantes visant à renforcer notre système électoral», a fait savoir par courriel Gabrielle Renaud-Mattey, la porte-parole du ministre d'État à la réforme démocratique, Pierre Poilievre.

Mais pour le NPD, le fait que Stephen Harper ait décidé de proroger le Parlement jusqu'en octobre repoussera définitivement l'adoption d'un projet de loi contre la fraude électorale, a-t-il fait savoir mercredi. Et cela, probablement jusqu'après les prochaines élections de 2015, croit-il.

Sans une loi avec plus de dents, les Canadiens iront voter, une fois de plus, avec une loi électorale faible, qui empêche le directeur général des élections de repérer efficacement les cas de fraude, avance le NPD.

«Depuis des années, le directeur général des élections demande que des changements spécifiques soient apportés à la Loi électorale (...) Malheureusement, les conservateurs n'ont rien fait. Pire encore : ils retardent le processus en mettant le cadenas à la porte de la Chambre des communes», dénonce le porte-parole du NPD en matière de réforme démocratique et parlementaire, Craig Scott.

Les quatre élections partielles auront lieu dans la circonscription montréalaise de Bourassa - détenue jusqu'à tout récemment par le député libéral Denis Coderre -, dans Toronto-Centre, et Provencher et Brandon-Souris, deux comtés manitobains.