Le gouvernement Harper s'affaiblit et il n'a que lui-même et ses propres manquements éthiques à blâmer, estiment les partis de l'opposition.

Le Bloc québécois, le NPD et le Parti libéral ont fait le bilan mercredi de la session parlementaire qui a pris fin mardi soir. Les députés ont voté à l'unanimité d'ajourner les travaux de la Chambre des communes pour l'été.

« Le socle de Harper commence à se déboulonner. Son vernis craque. Pour la première fois depuis qu'il a été élu, il commence à être ébranlé par tous les scandales qui le touchent », a noté le leader parlementaire du Bloc québécois, André Bellavance.

Les derniers mois ont en effet été difficiles pour le gouvernement conservateur, à commencer par le scandale des dépenses au Sénat; le départ du chef de cabinet de Stephen Harper Nigel Wright ; la démission du ministre Peter Penashue ; la démission de trois sénateurs du caucus conservateur; les accusations criminelles déposées contre un ex-adjoint conservateur dans l'affaire des appels frauduleux aux dernières élections ; les accusations de voies de fait et agression sexuelle contre le sénateur Patrick Brazeau ; la rébellion des députés d'arrière-ban ; et la démission fracassante du député Brent Rathgeber du caucus conservateur.

Le chef du NPD, Thomas Mulcair, est arrivé au même constat que le Bloc québécois : « Le gouvernement s'est affaibli et s'est embarrassé lui-même », a-t-il tranché.

M. Mulcair a en outre dénoncé la réticence du premier ministre à expliquer ses gestes au Parlement. Il a souligné que le premier ministre ne s'est présenté à la Chambre des communes qu'à cinq reprises au cours des cinq dernières semaines pour la période de questions quotidienne.

« C'est évident qu'en demandant des comptes à Stephen Harper, qui n'a fait que se cacher tantôt en Amérique du Sud, tantôt en Europe, qui refuse de venir a la période de questions et, quand il est là, qu'il refuse de répondre aux questions ou fait semblant de ne pas les comprendre, le public canadien est en position de dire : "Écoutez, vous n'êtes pas sérieux, vous ne nous respectez pas" », a-t-il lancé.

Le chef néo-démocrate a expliqué la décision de son parti d'accepter d'ajourner les travaux trois jours plus tôt que prévu en disant que le premier ministre avait justement décidé de ne pas revenir en Chambre pour faire face aux questions de ses adversaires politiques.

Le chef libéral Justin Trudeau a pour sa part pris acte des échanges acrimonieux des dernières semaines. Il a lui-même été pris à partie par les conservateurs pour avoir accepté de l'argent d'oeuvres de charité pour des discours.« Même si les Canadiens sont extrêmement cyniques par rapport à ce qui se passe ici et avec raison, on voit qu'il y a eu énormément de négativité et d'attaques personnelles dans cette Chambre », a-t-il déploré. À ses yeux, il était inutile pour les députés de siéger plus longtemps encore, car Stephen Harper n'avait manifestement pas l'intention de répondre aux questions de l'opposition.

Bilan législatif

Les troupes de Stephen Harper ont plutôt vanté leur bilan législatif. « Pendant que d'autres se sont concentrés sur le théâtre qu'est la période de questions, nous avons misé sur l'obtention de résultats pour les familles canadiennes », a résumé le leader du gouvernement à la Chambre des communes, Peter Van Loan.

Mais le lieutenant de Stephen Harper au Québec, Christian Paradis, a reconnu que les scandales des dernières semaines ont nui à l'image de son gouvernement conservateur.« Évidemment, les gens n'aiment pas ça. Il n'y a personne qui aime ça. Il y a quelques sénateurs qui ont abusé des règles et ils devront faire face aux conséquences. Mais c'est pour ça qu'il faut avoir des mesures de transparence. On ne s'est jamais gêné pour le faire. »

La Chambre siégeait jusqu'à minuit, voire une heure du matin depuis un mois, afin de permettre au gouvernement d'adopter en vitesse certains projets de loi. Aujourd'hui, 21 projets de loi recevront la sanction royale.  

Les projets de loi adoptés en vitesse à la dernière minute cette semaine incluent le projet de loi C-54, qui vise à sévir contre les personnes jugées non criminellement responsables, et S-14, qui durcit le ton contre les entreprises trouvées coupables de corruption d'agents étrangers.

Au cours des prochains mois, le premier ministre Harper devrait procéder à un remaniement majeur de son Conseil des ministres, vraisemblablement au début du mois de juillet. Plusieurs s'attendent aussi à ce qu'il proroge le Parlement vers le mois de septembre. Ce geste lui donnerait l'occasion de présenter ses priorités aux Canadiens pour la deuxième partie de son mandat et de donner un deuxième souffle à ses troupes en vue des prochaines élections fédérales, prévues pour 2015.