Le Nouveau Parti démocratique (NPD) tire à bout portant sur le Sénat pendant que le Parti conservateur lui cherche des boucliers.

C'est le financement du Sénat qui est à nouveau la cible du NPD: le parti vient de déposer une motion pour lui couper les vivres dès le 1er juillet.

L'occasion est trop belle. Le NPD cherche à se débarrasser du Sénat et le scandale des dépenses des sénateurs lui offre une cible sans fin.

La motion sera débattue mercredi.

Elle vise à abolir le budget annuel du Sénat voté par les Communes, environ 58 millions $ selon le NPD, et aussi le financement prévu par la loi, à hauteur de 34 millions $.

Pourquoi le 1er juillet?

«Ce serait un cadeau à se faire à la fête du Canada, le 1er juillet, de se débarrasser de cet organe, ce vestige», a lancé le chef du NPD, Thomas Mulcair.

«On va demander clairement qu'on arrête de dépenser l'argent du public sur le Sénat.»

Bref, le NPD, à défaut de pouvoir abolir la Chambre haute, veut lui enlever tout son budget, et donc les salaires de sénateurs.

«Ils feraient d'excellents bénévoles. Je suis sûr qu'ils sont tellement dévoués qu'ils vont venir bénévolement, puis s'il faut on ferait du covoiturage», a poursuivi M. Mulcair avec ironie.

La motion n'a vraisemblablement aucune chance d'être adoptée car les conservateurs sont majoritaires aux Communes. De plus, le Parti libéral ne souhaite pas que le Sénat soit aboli.

Elle constitue toutefois une autre démarche du NPD qui sert à tenir le dossier bien vivant.

Les dépenses des sénateurs ont commencé à faire des vagues à Ottawa quand il a été connu que quatre d'entre eux - Mike Duffy, Pamela Wallin, Mac Harb et Patrick Brazeau - auraient réclamé des allocations de logement sans y avoir droit. Le dossier a par la suite connu plusieurs rebondissements, notamment avec le chèque-cadeau de 90 000 $ fait par NIgel Wright, l'ex-chef de cabinet de Stephen Harper, à Mike Duffy pour l'aider à rembourser le Sénat.

Depuis, les conservateurs s'évertuent à protéger la réputation de leur parti et à trouver des façons de protéger le Sénat des scandales qui s'accumulent.

Leur plus récente tentative est la motion qu'ils ont déposée au Sénat, qui vise à appeler en renfort le vérificateur général du Canada pour qu'il examine toutes les dépenses de la Chambre haute.

Elle sera aussi débattue mercredi, à l'autre bout du corridor du Parlement.

Les libéraux sont en principe favorables à la démarche. Mais mardi après-midi, ils venaient tout juste de recevoir le texte de la motion, et souhaitaient d'abord l'étudier avant de se prononcer.

Le leader de l'opposition libérale au Sénat, James Cowan, s'interroge par ailleurs sur les motivations de Marjory LeBreton, la leader du gouvernement au Sénat.

«Je crois qu'il s'agit d'une distraction», a-t-il déclaré.

Le texte prévoit ce qui suit: «Que le Sénat invite le vérificateur général du Canada à procéder à une vérification intégrée des dépenses du Sénat, les dépenses des sénateurs y comprises».

Mme LeBreton dit avoir décidé de procéder à une revue complète des dépenses du Sénat après avoir reçu des centaines de courriels de contribuables outrés par le scandale sur les réclamations de résidence, de voyages et de frais divers impliquant quatre sénateurs.

Et si les travaux du vérificateur déterrent de plus gros problèmes qu'anticipés, ce sera tant pis, dit Marjory LeBreton.

«Les gens devront vivre avec les conséquences de leurs actions», tranche-t-elle.

«La prochaine étape est actuellement de s'assurer que cela ne se reproduise plus et que cela indique au public canadien que nous sommes sérieux avec la gestion de l'argent des contribuables», a-t-elle déclaré après avoir déposé la motion.

Thomas Mulcair trouve que d'avoir le vérificateur général venir se mettre le nez dans les dépenses du Sénat est une «excellente idée».

Il n'est toutefois pas facile de savoir si le vérificateur aura le temps d'entreprendre pareille étude.

Son bureau se refuse à tout commentaire, puisqu'il n'a pas encore reçu de demande formelle du gouvernement.

Mais sa liste de travaux prévus est longue. Pour l'automne 2014, neuf études sont déjà à l'horaire, dont les régimes de pensions du secteur public, la planification de l'infrastructure correctionnelle et le Programme des services de police des Premières Nations.

Quant à l'étendue du mandat, celui-ci est déterminé par le vérificateur lui-même. Il n'est pas certain que ses décisions concorderont avec les attentes des partis politiques à Ottawa.

La Gendarmerie royale du Canada a aussi été appelée à enquêter. La commissaire fédérale à l'éthique se penche aussi sur les actions de Nigel Wright.

Quant à la conseillère sénatoriale à l'éthique, elle avait aussi entamé une enquête sur le sénateur Mike Duffy, mais elle a fait savoir mardi qu'elle suspend son enquête pour le moment, parce que l'affaire a été référée à la GRC.