S'il devenait un jour premier ministre du Canada, Justin Trudeau n'augmenterait pas les impôts des contribuables ou des entreprises pour venir à bout du déficit fédéral. Il jure que la TPS demeurerait à 5%. Et il ne ferait pas une obsession de l'atteinte du déficit zéro.

Celui qui selon toute vraisemblance sera élu chef du PLC dimanche prochain estime que le gouvernement fédéral a suffisamment de sources de revenus pour s'acquitter de ses responsabilités sans avoir à augmenter le fardeau fiscal des Canadiens.

Le meneur de la course à la direction tourne ainsi la page sur certaines positions défendues par son parti dans le passé, notamment l'opposition à une nouvelle ronde de réductions du taux d'imposition aux entreprises en 2011 et le maintien de la TPS à 7% en 2006.

«Je ne veux pas augmenter les impôts des Canadiens. Le Canada a beaucoup d'argent au niveau du fédéral, mais je trouve qu'on le dépense mal», a-t-il affirmé au cours d'une rencontre éditoriale avec La Presse.

«Dans le cas de la TPS, on ne va pas l'augmenter. Je comprends qu'il y a des économistes qui disent que la taxe sur la consommation, c'est ça qu'on devrait augmenter et réduire les taxes personnelles. Je comprends ça. Mais je trouve que la classe moyenne souffre déjà assez. (...) Alors moi, ça, ça ne m'intéresse pas», a-t-il ajouté.

Pas d'obsession du déficit

Le gouvernement Harper a promis d'éliminer le déficit de 26 milliards en 2015, soit avant les prochaines élections, sans augmenter les impôts et sans couper dans les transferts aux provinces. Pour y arriver, il pourrait devoir imposer de nouvelles compressions si l'économie canadienne continuait à montrer des signes d'essoufflement.

À cet égard, M. Trudeau croit au retour à l'équilibre budgétaire, mais en tenant compte de la réalité des Canadiens. Il juge irresponsable la promesse des conservateurs d'éliminer le déficit coûte que coûte avant les prochaines élections. «C'est sûr que je voudrais éliminer le déficit, mais il faut le faire d'une manière qui reflète la réalité que vivent les Canadiens»,a-t-il dit, soulignant au passage que la dette publique du Canada, en proportion du PIB, est sous contrôle.

Il s'est par ailleurs dit en principe favorable aux projets d'oléoducs actuellement sur la table pour acheminer du brut de l'Ouest canadien vers l'est, à condition de démontrer un «souci pour l'environnement et les peuples autochtones».

Le Québec et les «vieilles chicanes»

Le député montréalais a reconnu que son parti avait encore beaucoup à faire au Québec avant les prochaines élections. Il ne s'est pas montré surpris du fait que la province comptait seulement 15 000 des 127 000 militants inscrits pour voter dans la course à la direction de son parti.

«Le défi pour moi, ça va être de ramener les Québécois vers la gouvernance du pays en entier, a-t-il dit. Il s'agit de convaincre les Québécois qu'ils vont être mieux servis avec des représentants du Parti libéral du Canada qu'avec leur député accidentel du NPD.»

Il a toutefois démontré peu d'appétit pour ce qu'il a désigné comme des «vieilles chicanes» identitaires: jeux de coulisse de la Cour suprême lors du rapatriement de la Constitution, révision de la loi 101 par le projet de loi 14... «La loi 101 fonctionne, a-t-il martelé. Mais de partir en peur parce qu'il y a trop de Québécois de souche qui quittent l'île de Montréal, c'est un problème économique. Ce n'est pas un problème identitaire. Il faut juste un peu de patience.»

À ceux qui jugent qu'il n'a pas l'expérience pour prendre la tête d'un gouvernement, M. Trudeau plaide pour la diversité et soutient qu'il faut donner la chance au coureur.

«Depuis cinq ans, j'ai énormément évolué, a-t-il noté. Je sais que dans les deux prochaines années, je vais énormément apprendre si jamais on me choisit en tant que chef.»