Sitôt publiée, sitôt critiquée: dès la publication fort attendue de la version finale de la réglementation fédérale sur la production d'électricité au charbon, mercredi, les groupes environnementaux ont dénoncé son inefficacité.



Le document rendu public par le ministre fédéral de l'Environnement, Peter Kent, propose des mesures moins contraignantes que celles contenues dans la version précédente, présentée l'été dernier.

De Saskatoon, M. Kent a expliqué que les nouvelles usines de charbon devaient désormais produire moins de 420 tonnes de dioxyde de carbone par gigawatt-heure d'électricité produite. Dans la première version de la réglementation, cette limite était située à 375 tonnes.

Bien qu'il ait admis avoir choisi un seuil dans «la partie supérieure» de la tranche avec laquelle il a travaillée - allant de 360 à 425 tonnes par gigawatt-heure -, le ministre Kent a indiqué avoir pris sa décision afin de ne pas placer le public devant «le risque que représenterait une alimentation inadéquate en électricité».

«Le 375 (...) aurait été applicable seulement si, dans le secteur de l'électricité produite avec du charbon, les usines fournissaient de l'électricité de manière constante, a-t-il expliqué. Mais dans les faits, les usines génèrent plus ou moins d'électricité en fonction de la demande.»

Les usines ne pourraient donc pas produire la quantité nécessaire d'énergie et respecter les normes environnementales en même temps, a résumé M. Kent.

Le temps alloué aux anciennes usines pour se plier aux nouvelles exigences a également été modifié dans la nouvelle version de la réglementation. Elle a augmenté d'une version à l'autre, passant de 45 à 50 ans.

Chez les environnementalistes, les critiques n'ont pas tardé à fuser, et le gouvernement Harper a été montré du doigt pour son «odieuse irresponsabilité face à la crise climatique». Les groupes environnementaux ont qualifié la nouvelle politique de «passe-droit à l'industrie du charbon pour polluer gratuitement pour les 50 prochaines années».

Le chef de campagne Climat et Énergie chez Greenpeace Canada, Keith Stewart, a dit craindre que l'affaiblissement de la réglementation dans le secteur du charbon ouvre la voie à une réduction semblable dans le secteur pétrolier. Il a ajouté que le charbon est la source de gaz à effet de serre qui est «la plus facile à éliminer», car il existe «de nombreuses solutions de rechange plus propres et qui sont plus avantageuses au point de vue économique».

À l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA), le directeur climat-énergie Patrick Bonin a déclaré que l'annonce de la nouvelle réglementation devrait «convaincre» les Canadiens «qui se demandent si le gouvernement Harper se soucie réellement de l'environnement». M. Bonin a qualifié la réglementation de poudre aux yeux, notant que selon lui, le gouvernement Harper passera à l'histoire «pour avoir bradé le futur et l'environnement des Canadiens pour développer des énergies sales qui datent du dernier siècle».

«La mise en place de cette réglementation représentait une occasion pour démontrer le sérieux du gouvernement Harper quant à la lutte aux changements climatiques, et il l'a complètement manquée», a pour sa part déploré Christian Holz, directeur général du Réseau action climat Canada.

Le charbon est l'une des énergies fossiles les plus polluantes et sa combustion représente actuellement 11,5 pour cent des émissions canadiennes de gaz à effet de serre (GES), selon les environnementalistes. «La réglementation fédérale sur le charbon représentait les premiers efforts de la part du gouvernement pour atteindre ses objectifs peu ambitieux de réduction d'émissions de GES», ont-ils noté.

La réglementation entrera en vigueur le 1er juillet 2015.