Certains dossiers de la Gendarmerie royale du Canada -dont des documents étoffés sur l'ancien premier ministre québécois René Lévesque et les anciens chefs du Nouveau Parti démocratique (NPD) David Lewis et Tommy Douglas- se sont retrouvés à Bibliothèque et Archives Canada. D'autres ont été détruits, révèlent des documents obtenus par La Presse Canadienne en vertu des dispositions de la Loi sur l'accès à l'information.

Le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), créé en 1984, s'est penché sur le destin des informations ultra-secrètes autrefois détenues par le Service de sécurité de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), démantelé après une série de scandales.

Dans le but de découvrir des individus subversifs, les espions de la GRC ont surveillé une vaste gamme d'individus et d'organisations, allant des professeurs et des membres du clergé à des groupes en faveur de la paix et des environnementalistes.

En 1988, James Kelleher, alors ministre fédéral responsable du SCRS, a demandé au service de renseignement de trier les dossiers restants.

Des 495 340 dossiers examinés, 438 218 d'entre eux, soit plus de 88%, ont été détruits. Des documents sauvés de la déchiqueteuse, 28 820 ont été archivés et 28 302 conservés. Parmi ces derniers se trouvaient 668 dossiers du «Programme VIP» concernant des politiciens et des fonctionnaires des trois niveaux de gouvernement, a révélé un auteur dans un livre paru en 2002.

La majorité des noms des dossiers demeurent secrets. Les dossiers de sécurité sur certains individus sont accessibles auprès de Bibliothèque et Archives Canada seulement 20 ans après la mort de la personne concernée, et tenter de les trouver relève en partie de la devinette et du coup de chance, puisque plusieurs ont été détruits.

Selon des rapports récemment rendus publics, les dossiers concernant les anciens premiers ministres John Diefenbaker et Lester B. Pearson ont été évalués par le SCRS en 1988.

M. Diefenbaker, un combatif politicien, a mené le Parti progressiste-conservateur au pouvoir en 1957. Quant à M. Pearson, après avoir fait sa marque à titre de ministre des Affaires étrangères, il a battu M. Diefenbaker et formé un gouvernement libéral minoritaire en 1963.

«Les dossiers sur MM. Pearson et Diefenbaker ont été montés par le Service de sécurité de la GRC, sans doute au plus fort de la Guerre froide», a déclaré une porte-parole du SCRS Tahera Mufti dans une réponse écrite à diverses questions.

«Il s'agissait d'une époque, comme l'indiquent certains historiens, où la communauté sécuritaire voyait des menaces... qui pourraient nous sembler exagérées aujourd'hui.»

Mme Mufti a indiqué que c'était en partie à cause d'un tel comportement que le gouvernement fédéral a décidé de séparer les renseignements des autorités policières, menant à la création du SCRS, une agence civile.