Thomas Mulcair ne s'attend pas à être accueilli en héros lorsqu'il se rendra dans le Nord de l'Alberta, jeudi, afin de visiter les régions qui exploitent les sables bitumineux. Mais il croit qu'une majorité de Canadiens appuie le principe du pollueur-payeur qu'il propose.

Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) ira expliquer cette politique de vive voix à ceux qui voudront bien l'entendre durant cette tournée éclair en sol albertain. Il fait ainsi fi des attaques dont il a fait l'objet depuis trois semaines de la part des conservateurs de Stephen Harper et des premiers ministres des trois provinces de l'Ouest.

M. Mulcair a provoqué une tempête politique en déclarant, lors d'une entrevue à la radio de CBC, que l'exploitation des sables bitumineux a contribué à une appréciation du dollar canadien qui a fait mal au secteur manufacturier de l'Ontario et du Québec. Il a affirmé que le Canada souffrait ainsi du syndrome hollandais et que le meilleur moyen de contrer les effets de ce syndrome était d'imposer le principe du pollueur-payeur à cette industrie.

Durant sa visite, M. Mulcair rencontrera la mairesse de Fort McMurray, Melissa Blake, des dirigeants de Suncor et le vice-premier ministre de l'Alberta, Thomas Lukaszuk. La première ministre de l'Alberta, Alison Redford, avait dit être prête à rencontrer le chef du NPD, mais a finalement préféré déléguer son vice-premier ministre.

M. Mulcair sera accompagné d'une délégation de trois députés néo-démocrates: Peter Julian, de la Colombie-Britannique, Megan Leslie, de la Nouvelle-Écosse, et Linda Duncan, seule députée du NPD de l'Alberta (Edmonton-Strathcona). Le chef du NPD de l'Alberta, Brian Mason, sera également présent durant la tournée de M. Mulcair.

La délégation néo-démocrate survolera notamment la région de Fort McMurray, où se trouve la majorité des activités de l'industrie des sables bitumineux. La rencontre entre M. Mulcair et M. Lukaszuk aura lieu en après-midi à Edmonton.

Respect de l'environnement

Interrogé au sujet de cette visite, M. Mulcair a répété qu'il est favorable à l'exploitation des sables bitumeux, mais que cela doit se faire d'une manière qui respecte l'environnement. Il s'est aussi défendu d'avoir lancé des flèches en direction des provinces de l'Ouest.

«J'ai parlé de développement durable. J'ai dit à n'en plus finir que ça s'appliquait autant dans l'Ouest que dans l'Est. Dire que tu veux regarder les aspects écologiques et économiques et sociaux chaque fois que t'as un problème, ça s'applique partout au Canada. Donc, il s'agit d'un discours de développement durable, de veiller au maintien d'une économie équilibrée, une chose sur laquelle on travaille depuis très longtemps», a dit M. Mulcair.

«Face à la réalité»

À la veille de cette visite hautement médiatisée, le ministre des Ressources naturelles, Joe Oliver, a de nouveau accusé Thomas Mulcair, mercredi, de vouloir imposer une taxe sur le carbone et de fermer l'industrie des sables bitumineux.

«On peut toujours espérer qu'il fera sa visite avec un esprit ouvert. Si c'est le cas, il fera face à la réalité, la réalité de l'importance de cette importante ressource pour l'emploi, la croissance économique et les recettes gouvernementales», a dit M. Oliver.

«Laissons-le visiter les sables bitumineux, mais n'oublions pas qu'il veut imposer une taxe sur le carbone, fermer les sables bitumineux et tuer des centaines de milliers d'emplois», a-t-il ajouté.

À quelques heures de cette visite de M. Mulcair au pays des sables bitumineux, deux études sur les conséquences de l'exploitation de cette ressource naturelle ont été publiées.

Une première, menée par l'Institut Pembina, donne du poids aux arguments de Thomas Mulcair en concluant que le Canada souffre d'une forme unique du phénomène, baptisée «fièvre des sables bitumineux», qui génère des retombées économiques à court terme, mais dont l'importance est souvent exagérée. L'étude ajoute que ces retombées sont réparties inégalement dans le pays, et qu'elles pourraient réserver de mauvaises surprises éventuellement.

La seconde étude, réalisée par l'Institut Macdonald-Laurier, soutient au contraire que l'industrie canadienne des hydrocarbures profite à l'ensemble du pays, puisque les dollars générés par les exportations de pétrole et de gaz naturel servent ensuite à acheter des biens et services au Canada.