Le ministre Christian Paradis a accordé un traitement de faveur à un ancien collègue conservateur et s'est placé en conflit d'intérêts en donnant l'ordre à un employé d'organiser une rencontre avec des fonctionnaires pour donner un coup de main à son entreprise.

C'est la décision rendue jeudi par la commissaire fédérale aux conflits d'intérêts et à l'éthique de la Chambre des communes, Mary Dawson. M. Paradis ne recevra toutefois pas de sanction, puisqu'il n'y en a aucune de prévue par la loi pour ces infractions.

Organiser une rencontre

Les faits reprochés remontent à l'été et à l'automne de 2009. Rahim Jaffer, un ex-député conservateur devenu lobbyiste, avait pris contact avec Christian Paradis pour lui demander son avis sur la possibilité d'installer des panneaux solaires sur le toit des édifices du parlement pour le compte de sa compagnie, Green Power Generation.

M. Paradis, alors ministre des Travaux publics, avait demandé à un membre de son personnel politique, Sébastien Togneri, d'organiser une rencontre avec des fonctionnaires de son ministère. Cette rencontre avait eu lieu vers le mois d'octobre 2009. Cependant, le projet pour lequel l'ancien député sollicitait près de 180 millions de dollars en financement gouvernemental, n'a jamais vu le jour.

La commissaire Dawson a jugé que M. Paradis avait contrevenu à deux articles de la Loi sur les conflits d'intérêts, soit l'article 7 (traitement de faveur) et l'article 6 (1) (conflits d'intérêts). «Il est certes naturel de vouloir aider ceux que l'on connaît, a noté Mary Dawson. Néanmoins, je crois que le fait de faciliter l'accès à des décideurs ou à des gens qui peuvent les influencer entre dans l'interdiction prévue dans la loi contre tout traitement de faveur.»

Le ministre Paradis a réagi par voie de communiqué, en fin d'après-midi: «J'accepte les conclusions de la commissaire dans ce rapport, a-t-il déclaré. À l'avenir, je prendrai des précautions supplémentaires.»

«La commissaire a reconnu dans son rapport qu'il n'y a jamais eu de tentative d'influencer les décisions des fonctionnaires, a par ailleurs souligné le ministre. La compagnie en question n'a jamais obtenu de contrat. Je dois insister sur le fait qu'il n'a jamais été question pour moi d'obtenir quelque avantage que ce soit, financier ou autre.»

La gravité de l'affaire

Selon le député du NPD Guy Caron, cela n'enlève rien à la gravité de l'affaire. «L'intention était de donner un accès privilégié à M. Jaffer et c'est ce qui s'est produit, a-t-il tranché. Que le reste du processus n'ait pas donné les avantages auxquels M. Jaffer s'attendait, il n'en demeure pas moins que M. Paradis a agi avec M. Jaffer d'une manière dont il n'aurait pas agi avec quelqu'un d'autre de l'extérieur qui n'aurait pas eu les mêmes contacts, les mêmes relations.»

Le NPD insiste pour que Stephen Harper demande à son ministre de répondre «de ses actes».

Tant Rahim Jaffer que Sébastien Togneri ont beaucoup fait parler d'eux au cours des dernières années. M. Jaffer et son épouse, Helena Guerguis, ont été trouvés coupables d'avoir contrevenu à au moins deux lois fédérales dans cette affaire. C'est la première fois, cependant, que la responsabilité de Christian Paradis est directement mise en cause.

Au moins une autre plainte contre le ministre serait actuellement à l'étude par la commissaire dans un autre dossier: celle du député Guy Caron concernant le choix d'un immeuble pour y établir des bureaux fédéraux. M. Paradis a répondu par une poursuite en diffamation contre son adversaire politique.