Les négociations entre la Coalition avenir Québec et l'Action démocratique du Québec portent sur des questions de principe, soutient le chef adéquiste Gérard Deltell. La réalité est moins élégante.

Les discussions qui durent depuis un mois entre François Legault et le chef adéquiste portent surtout sur des questions plus triviales; le rôle des transfuges dans la petite formation à l'Assemblée nationale. Surtout, on discute encore de l'avenir de Sylvie Roy, députée adéquiste de Lotbinière et leader parlementaire de l'ADQ.

En vertu de la nouvelle carte électorale dessinée par le Directeur général des élections, la circonscription qu'elle représente disparaîtra au prochain scrutin. Son territoire se trouve fusionné à la circonscription de Frontenac, représentée par le ministre Laurent Lessard. Ancien maire de Thetford, M. Lessard semble indélogeable.

Mme Roy devra se trouver une circonscription; or, le seul endroit naturel est Chute-de-la-Chaudière, que représente l'adéquiste devenu indépendant Marc Picard. Ce dernier est déterminé à se représenter même s'il a dit le contraire quand il a claqué la porte de l'ADQ, avec Éric Caire. Le tandem était d'ailleurs cette semaine au cocktail de financement de François Legault, à Québec. «M. Picard a été leader parlementaire de l'ADQ avant que je ne le sois, a rappelé Mme Roy à La Presse. Il ne fait pas partie de mes amis», lance-t-elle sans détour.

Même avant les élections, le partage des responsabilités parlementaires - et, par conséquent, des primes - reste une source de tension; Daniel Ratthé et Benoît Charrette, qui ont parié sur la CAQ et quitté le PQ, sont aussi en droit de réclamer des responsabilités. À l'ADQ, François Bonnardel entretient depuis longtemps d'excellentes relations avec François Legault, tandis que le chef Deltell est un quasi-inconnu pour l'ancien ministre péquiste.

Incertitude pour l'avenir de certains adéquistes

La fusion des deux partis a des conséquences imprévues. La Coalition avenir Québec n'a pas l'intention de prendre à son compte les comités exécutifs adéquistes dans les circonscriptions. On veut repartir à neuf; François Legault va lui-même choisir et nommer les candidats à compter du début de 2012. Du coup, des adéquistes de longue date se retrouvent dans l'incertitude. C'est le cas du président-directeur général du parti, Christian Lévesque, qui voulait se représenter dans son ancienne circonscription, Lévis. Un congrès de fondation est prévu pour mars, après que l'ADQ eut fait valider par ses membres les conditions de la fusion avec la CAQ.

La question des «valeurs adéquistes» est plus facilement négociée que ces réalités concrètes. Depuis un moment, Gérard Deltell sait que François Legault n'accepte pas de faire sienne la proposition adéquiste de verser 100$ par semaine aux familles qui décident de garder un enfant à la maison, plutôt que d'occuper une place dans une garderie à 7$.

On s'est entendus assez facilement sur la question de la place du privé en santé, une question centrale pour l'ADQ. Vendredi, dans son dernier point de presse comme chef adéquiste, Gérard Deltell a rappelé que la mixité public-privé en santé était importante. François Legault se dira ouvert à un «projet-pilote» selon lequel les médecins pourront faire des actes dans une clinique privée après avoir fait leurs heures dans les établissements publics. «On ne peut pas du jour au lendemain changer ce qui existe, il faut y aller une étape à la fois», a dit M. Deltell, semblant satisfait d'un «projet-pilote». En revanche, à l'annonce de la fusion entre les deux partis, la semaine prochaine, on restera bien vague sur le fonctionnement exact de ce projet-pilote.