Les relations semblent être de plus en plus tendues entre le Canada et la Tunisie, tandis que les deux pays tentent de trouver un terrain d'entente sur la question du vote des ressortissants tunisiens au scrutin de l'assemblée constituante, le 20 octobre.

Le Globe and Mail a rapporté mercredi que des observateurs électoraux canadiens s'étaient vu refuser leur accréditation par le gouvernement tunisien, en attendant que le différend entre les deux pays soit résolu.

Puis, en comité parlementaire à Ottawa jeudi, un député conservateur s'est fermement opposé à la proposition de ses homologues néo-démocrates et libéraux de permettre à l'ambassadeur de Tunisie, qui se trouvait dans la salle, de se faire entendre.

«Je ne crois pas que ce soit approprié pour lui de s'adresser à ce comité, a tranché Bob Dechert, en réponse à une suggestion du député libéral Dominic LeBlanc. La raison de cette réunion est d'entendre quelle est la politique canadienne, de la bouche d'officiels canadiens. Donc, le gouvernement s'y oppose vigoureusement.»

Le NPD a dénoncé ce refus: «Depuis quand le gouvernement décide-t-il qui les comités peuvent entendre? Depuis quand seuls les fonctionnaires peuvent-ils témoigner?»,a demandé la députée Hélène Laverdière.

Grogne et souveraineté

La mésentente vient de la décision d'Ottawa d'interdire l'inclusion du Canada dans une circonscription électorale d'un autre pays. Elle a été signalée aux autorités tunisiennes à la fin du mois de septembre.

Cette décision a été dénoncée par des groupes de Tunisiens et plusieurs politiciens. Selon eux, la rigidité de la position canadienne empêchera les Tunisiens de voter lors de ces élections cruciales. Environ 15 000 ressortissants tunisiens vivraient ici. Le scrutin qui se tiendra dans deux semaines vise à élire l'assemblée qui rédigera la nouvelle constitution du pays.

Au comité permanent des Affaires étrangères et du Développement international, jeudi, de hauts fonctionnaires fédéraux ont expliqué leur position: en vertu d'une politique interne datant de 2008, le gouvernement fédéral refuse d'être ainsi inclus dans une circonscription étrangère, comme c'est le cas en l'occurrence.

«La politique ne vise pas un pays ou une région en particulier», a expliqué Roxanne Dubé, directrice générale du bureau de la stratégie et des services géographiques du ministère des Affaires étrangères. Elle a ajouté que le vote au Canada de ressortissants étrangers dans le cadre d'élections dans leur pays d'origine n'était pas lui-même interdit et que ceux de 27 pays avaient ainsi pu remplir leurs obligations démocratiques au cours des deux dernières années.

«La politique vise à soutenir la souveraineté du Canada et à réduire l'ingérence étrangère dans les affaires intérieures canadiennes. Personne ne devrait représenter le Canada en tant que circonscription», a tranché Mme Dubé.

Cette politique fait également des vagues en France, où de nouvelles règles ont fait du Canada une circonscription française [avec les États-Unis], en vue du scrutin de 2012. «Nous espérons, comme avec le gouvernement tunisien, que nous arriverons à une situation acceptable tout en expliquant clairement les tenants et les aboutissants de la politique actuelle [...] pour laquelle nous ne prévoyons pas d'exception», a tranché Roxanne Dubé.