Le bureau du premier ministre Stephen Harper se souciait tellement de contrôler l'opinion publique en ce qui concerne la guerre menée par le Canada dans le sud de l'Afghanistan que même le ministre de la Défense nationale, Peter MacKay, était parfois tenu dans l'ignorance, selon un nouveau livre portant sur le conflit.

The Savage War: The Untold Battles of Afghanistan, dont l'auteur est Murray Brewster, correspondant de La Presse Canadienne en Afghanistan, peint le portrait d'un bureau du premier ministre désireux de protéger son pouvoir minoritaire au parlement et de contrôler le message envoyé à la population au sujet de la guerre en Afghanistan.

M. MacKay, qui a succédé à Gordon O'Connor au ministère de la Défense nationale en août 2007, a été étonné par la décision prise plus tard cette année-là par le gouvernement Harper de constituer un groupe d'experts devant se pencher sur la mission des Forces canadiennes sur le sol afghan, avec à sa tête l'ancien ministre libéral John Manley, a écrit M. Brewster.

«Ça n'a pas été discuté au sein du cabinet, non, a affirmé le ministre en entrevue. Je n'étais pas au courant de tous les détails.»

Jack Layton en savait encore moins. Dans le cadre d'entrevues accordées plus tôt cette année, avant sa mort, le dirigeant néo-démocrate a confié à M. Brewster que le premier ministre n'avait en aucune occasion tenté de parler longuement avec lui au sujet de l'implication croissante des troupes canadiennes face aux insurgés.

Ces révélations font surface alors que le ministre MacKay se trouve au coeur d'une controverse entourant son utilisation d'appareils Challenger du gouvernement - 32 fois depuis 2008, à un coût total de plus de 2,9 millions $.

Il se retrouve également en mauvaise posture à cause de vacances passées en 2010 dans un chalet de pêche à Terre-Neuve-et-Labrador appartenant au président de Marine Atlantique, une société de la Couronne fédérale, durant lesquelles il s'est déplacé à bord d'un hélicoptère de sauvetage Cormorant.

Dans le livre, non encore paru, M. MacKay laisse également entendre que le Canada s'est engagé à Kandahar sans avoir une idée précise de l'ampleur du défi qu'il lui fallait relever face aux talibans.

L'ouvrage documente de quelle façon l'apparent besoin de M. Harper de contrôler les communications a été alimenté, en partie, par la baisse du soutien de la population à la guerre et l'opposition croissante exprimée par les néo-démocrates, qui ont fini par réclamer le retrait immédiat et total des troupes canadiennes déployées en Afghanistan.