La vague orange qui a touché le Québec le 2 mai dernier n'est pas le résultat d'un regain du fédéralisme ou d'un glissement à gauche de la province, suggère un sondage Léger Marketing mené au lendemain des dernières élections générales.

Christian Bourque, vice-président de la firme de recherche, estime que c'est plutôt le cynisme et le dégoût des Québécois envers la classe politique qui peuvent expliquer ces résultats.

«Les premiers à «passer au bat', c'a été les politiciens fédéraux, et les Québécois ont frappé un circuit», a illustré M. Bourque. «On ne peut pas dire que ça marque un changement dans la perception qu'ils ont de la place du Québec dans le Canada, ou du rôle que le Québec joue dans le Canada.»

Entre décembre 2010 et mai 2011, l'attachement au Canada chez les francophones du Québec est resté inchangé, conclut le sondage commandé par l'Association d'études canadiennes. Environ 60% des Québécois se disent attachés à Ottawa, contre 40% qui affirment ne pas l'être.

Pourtant, à l'issue de cette période, la députation du seul parti politique souverainiste sur la scène fédérale a chuté massivement, de 47 à 4 parlementaires. Le NPD de Jack Layton, fédéraliste, a profité le 2 mai dernier de cet effondrement, passant d'un député à 58.

Par ailleurs, un nombre important de Québécois qui ont voté pour le NPD refusent de se positionner sur l'axe gauche-droite, porte à croire le sondage. Vingt-neuf pour cent des sondés ont affirmé ne pas savoir où ils se situent sur l'échiquier politique.

Les répondants qui ont voté pour le Bloc québécois sont d'ailleurs proportionnellement beaucoup plus nombreux à se dire de gauche que ceux qui ont voté pour le NPD.

«Ce n'était pas un vote idéologique», conclut Jack Jedwab, directeur exécutif de l'Association d'études canadiennes, tout en reconnaissant que les Québécois qui ont appuyé la formation politique de Jack Layton sont en majorité issus de la gauche ou du centre politique.

Quatorze pour cent des électeurs de la province qui ont voté NPD se définissent comme de droite ou de centre-droit, suggère le sondage.

Selon M. Jedwab, il s'agit aussi de la première fois depuis l'ère Trudeau que les francophones et les anglophones du Québec votent de façon aussi semblable pour un même parti.

En l'absence d'un changement de fond dans les opinions politiques de la province, Jack Layton aura fort à faire pour conserver l'appui des Québécois et ne pas devenir victime d'une autre vague, a évalué Christian Bourque. «Ça va rendre la chose assez difficile pour les dirigeants du NPD: être capable de garder dans les rangs ce nouvel électorat-là qui, en proportion assez importante, est composé de nationalistes mous.»

Le sondage a été réalisé les 5 et 6 mai derniers auprès de 976 électeurs québécois qui se sont exprimés lors du dernier scrutin. Il comporte une marge d'erreur de 3,1 points de pourcentage, 19 fois sur 20.