Le gouvernement Harper doit rendre public sous peu un rapport de vérification sur des dépenses qui ont choqué la ministre des Travaux publics, Rona Ambrose. Le hic, c'est ce que ce rapport a coûté quatre fois plus cher que prévu et qu'il est en retard de plusieurs mois.

La Presse a révélé l'an dernier que Profac, filiale de SNC-Lavalin, avait facturé des sommes apparemment exagérées pour de menus travaux réalisés dans l'immeuble où se trouvent les bureaux du ministre des Travaux publics, à Gatineau.

Obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, des factures montraient notamment qu'Ottawa avait payé 5000$ pour faire installer six plafonniers encastrés et 1000$ pour faire poser une sonnette.

«Ces coûts sont inacceptables. C'est une insulte pour le contribuable moyen», avait déclaré la ministre des Travaux publics, Rona Ambrose, à la Chambre des communes, le jour de la publication de l'article.

Mme Ambrose avait aussitôt annoncé la tenue d'une vérification indépendante. Le mandat a été accordé un mois et demi plus tard, soit en avril 2010, à PricewaterhouseCoopers (PWC). La valeur initiale du contrat devait être de 155 000$. Or, selon un relevé publié sur le site du ministère des Travaux publics, le coût de la vérification a depuis bondi à 565 000$, soit près de quatre fois plus que prévu.

Nos demandes répétées auprès de Travaux publics pour obtenir des explications sont demeurées sans réponse. Lundi, après plusieurs semaines d'attente, une porte-parole du Ministère a finalement admis que c'était le bureau de la ministre qui bloquait le processus.

«Le rapport devrait être publié cette semaine et nous pourrions vous le donner à l'avance si vous n'écrivez rien d'ici là», a quant à elle proposé la directrice des communications de Mme Ambrose, Rebecca Thompson, lorsque nous l'avons jointe.

PWC devait accomplir son mandat en deux phases: la firme devait d'abord se pencher sur des dépenses prédéterminées et dire, dans un rapport à remettre en juillet dernier, si elles étaient raisonnables. C'est le compte rendu de cette première phase qui doit être rendu public cette semaine. Il y avait une demi-douzaine de ces «dépenses prédéterminées». Il s'agissait essentiellement de celles qu'a révélées La Presse en mars dernier, dont près de 2000$ pour l'achat et l'entretien de deux plantes et de deux pots et 1400$ pour l'installation de trois stores.

Le rapport de cette première phase devait à l'origine être remis au gouvernement en juillet. Il ne l'aurait été que tout récemment. Les porte-parole du Ministère ont expliqué ce retard par la complexité de la tâche confiée à la firme comptable, sans donner plus de détails.

La deuxième phase du mandat de PWC consiste à examiner plus en profondeur l'ensemble des dépenses du contrat de Profac afin de voir si elles sont justifiables et si des problèmes systémiques existent. Les porte-parole du Ministère et du bureau de la ministre Ambrose ont affirmé que cette seconde phase sera bel et bien menée mais, encore une fois, on ignore quand le rapport sera rendu public.

Profac, aujourd'hui appelée SNC-Lavalin O&M, a remporté en 2004 un lucratif contrat de 6 milliards de dollars pour gérer 320 immeubles fédéraux un peu partout au Canada. Chaque année, le gouvernement fédéral lui verse près de 550 millions de dollars. L'entente devait au départ durer jusqu'en 2009. Elle a depuis été prolongée jusqu'en 2013.

SNC-Lavalin avait réagi au reportage de La Presse en attribuant certains coûts aux contraintes en vigueur, notamment relativement aux heures supplémentaires des électriciens. Le PDG du géant québécois de l'ingénierie, Pierre Duhaime, avait aussi affirmé dans une lettre ouverte que La Presse avait passé sous silence des détails importants sur les travaux réalisés.