Le parti qui provoquera les prochaines élections devra en payer le prix politique, prévient Stephen Harper dans une entrevue accordée à Mario Dumont et diffusée hier soir sur la chaîne V.

Alors que les rumeurs d'élections printanières s'intensifient, le premier ministre assure que ce n'est pas lui qui forcera le jeu pour déclencher un scrutin général, même si des gains dans la région de Toronto semblent à portée de main.

«On me dit qu'il y a des opportunités mais, franchement, la population ne cherche pas des élections opportunistes. La vraie préoccupation de la population, c'est l'économie. Et moi, je suis content de gouverner», a soutenu M. Harper.

«Si les partis politiques n'écoutent pas la population, si on force des élections dont personne ne veut, je pense que les partis qui le font vont en payer le prix», a-t-il ajouté.

L'accent sur les régions

Quoi qu'il en soit, si cela se produit, le Parti conservateur se présentera comme le parti des régions au Québec, a laissé entendre M. Harper. «Nous sommes déjà une force importante dans les régions, a-t-il dit. Les régions ont besoin de création d'emplois, de croissance et de développement économique. C'est important pour elles. On ne peut pas avoir ça avec n'importe quel parti qui décide de voter contre n'importe quel projet de loi fédéral.»

La population des régions du Québec aura à se demander, selon lui, «si c'est important d'avoir des députés autour de la table» lorsque les décisions sont prises.

Signe que les conservateurs concentrent leurs énergies sur les circonscriptions situées à l'extérieur de Montréal, les nouvelles publicités en français lancées hier ne parlent que «des régions du Québec».

«J'ai fait beaucoup d'efforts depuis mon élection comme chef du Parti conservateur pour créer une base conservatrice au Québec», a souligné le premier ministre, qui donnait pour la première fois une entrevue à l'ancien chef de l'Action démocratique du Québec, devenu animateur à la télévision après avoir quitté la politique, en 2009.

L'ADQ et le Parti conservateur de Stephen Harper ont longtemps partagé non seulement la même base d'électeurs au Québec, mais aussi souvent les mêmes organisateurs politiques.

En décembre 2007, le premier ministre avait prononcé un discours dans la circonscription du chef adéquiste, scellant ainsi une alliance entre les deux formations de centre droit. Les deux hommes se connaissent bien; en entrevue, M. Harper va jusqu'à appeler l'animateur par son prénom.

Constitution et sables bitumineux

Répétant qu'il estime avoir rétabli la paix constitutionnelle au Canada, le premier ministre concède qu'il «reste des choses à régler au Québec» mais soutient que, en période de récession économique mondiale, l'heure n'est pas aux grands changements constitutionnels.

«Même si nous n'avons pas beaucoup de sièges au Québec, nous avons amélioré beaucoup la situation depuis notre arrivée en fonction, a-t-il dit. Au final, est-ce que ça règle tous les problèmes? Évidemment non. On veut voir un Québec plus à l'aise au sein de la fédération canadienne. C'est un job qu'on n'a pas encore tout à fait réalisé.»

Quant aux sables bitumineux, M. Harper a réitéré les déclarations de son ministre de l'Environnement, Peter Kent, qui a affirmé, à peine 24 heures après sa nomination, au début du mois, que la lucrative industrie albertaine produit du «pétrole éthique», ce que contestent les environnementalistes et les partis de l'opposition.

«On ne peut pas douter de l'importance de cette industrie pour notre pays et pour la sécurité énergétique de ce continent», a conclu le premier ministre.