Alors qu'ils se sont fait promettre au printemps dernier qu'ils pourraient connaître la teneur des documents concernant les allégations de torture de détenus afghans, les parlementaires pourraient finalement voir leur voeu exaucé avec l'arrivée de la nouvelle année.

Après des mois de consultations à huis clos, les députés qui épluchent les dossiers depuis cet été pourraient en présenter un premier échantillon aux Communes dès janvier, selon le chef du Bloc québécois.

Gilles Duceppe a fait cette annonce à sa sortie des Communes, jeudi, quelques heures après que son homologue néo-démocrate, Jack Layton, ait dénoncé le silence qui règne depuis des mois dans cette affaire.

L'opposition tente depuis plus d'un an de faire la lumière sur les allégations de torture de prisonniers capturés par l'armée canadienne et transférés aux autorités afghanes.

Des élus des partis conservateur, libéral et du Bloc québécois consultent depuis le mois de juin, en secret, des documents portant sur le sujet.

Mais un an, jour pour jour, après que l'opposition se soit prononcée de façon unanime pour réclamer au gouvernement de consulter des versions non censurées de ces archives, les parlementaires n'en ont toujours rien vu.

Une «loi du silence» imposée par les conservateurs, libéraux et bloquistes, a accusé Jack Layton, qui a fait valoir, en point de presse jeudi matin, qu'en vertu de l'entente conclue entre les trois partis les parlementaires ne sauraient jamais ce qui se cache dans les fameux documents réclamés depuis plusieurs mois.

En avril dernier, le président des Communes, Peter Milliken, avait reconnu le droit des élus de recevoir copie des dossiers.

Deux mois plus tard, le gouvernement conservateur s'était entendu avec les libéraux et les bloquistes pour mettre sur pied un comité spécial chargé de consulter, à huis clos, des copies vierges de ces documents, afin de ne pas compromettre la sécurité nationale et celle des Forces armées en dévoilant des informations sensibles qui pourraient s'y trouver.

Mais le NPD avait claqué la porte aux négociations, en plaidant que le mécanisme dont avaient convenu les partis ne permettrait pas de faire toute la lumière sur les allégations de torture.

Six mois plus tard, les néo-démocrates clament avoir vu juste, puisque le comité spécial chargé d'éplucher les dizaines de milliers de pages n'a toujours rien à montrer.

«(L'entente) ne fonctionne pas, la vérité ne sort pas. Il faut appuyer une enquête publique», a dit le leader néo-démocrate, en appelant ses homologues libéral et bloquiste, Michael Ignatieff et Gilles Duceppe, à réclamer à leur tour une enquête indépendante afin de déterminer ce qui s'est réellement passé dans les prisons afghanes et ce que savait le gouvernement canadien sur le sujet.

Quelques heures plus tard, le chef bloquiste est cependant venu mettre un bémol à ces critiques, en indiquant qu'un «nombre imposant de documents» pourrait être présenté aux Communes dès janvier.

S'il semblait lui-même s'impatienter, il y a quelques semaines, de voir les mois défiler sans qu'aucune information ne traverse les portes closes du comité spécial, M. Duceppe a néanmoins vanté le travail des députés, jeudi.

«J'ai dit (à l'époque) qu'il fallait que ça sorte bientôt, et là on a l'assurance que ça sera en janvier. Or, donc, moi je pense qu'il y a du travail qui a été bien fait», a-t-il plaidé, à sa sortie de la Chambre des communes.

Les conservateurs et les libéraux n'ont pas confirmé la date du premier dépôt de documents, le porte-parole libéral en matière de défense, Dominic LeBlanc, se contentant de dire que ce serait fait «bientôt».

Conservateurs, libéraux et bloquistes maintiennent, depuis des mois, qu'il faut laisser le processus suivre son cours et le temps au comité d'étudier les documents. Un discours repris jeudi par les représentants des trois partis qui ont plaidé que le NPD était tout simplement frustré de ne pas participer, par sa faute, à l'étude des dossiers.

«Le NPD n'était pas sérieux depuis le début pour trouver une façon de faire fonctionner ce processus», a réagi M. LeBlanc à la sortie de M. Layton.

Au bureau du ministre de la Justice, Rob Nicholson, on a souligné que «le processus fonctionne bien» et que le gouvernement continue de «travailler de bonne foi» avec les libéraux et les bloquistes.