Les gens d'affaires voient d'un très mauvais oeil la promesse des libéraux d'annuler la baisse de l'impôt des entreprises prévue le 1er janvier 2011 s'ils prennent le pouvoir aux prochaines élections.

La Chambre de commerce du Canada (CCC) compte lancer une offensive publicitaire dans les prochaines semaines afin de dénoncer cette promesse, qui risque, selon son président, Perrin Beatty, de créer de l'incertitude et de retarder des investissements nécessaires à la relance de l'économie.

M. Beatty, qui a été ministre dans le gouvernement conservateur de Brian Mulroney, a indiqué que son organisation entend aussi rencontrer les députés à ce sujet.

«C'est une source de grande inquiétude et nous n'allons pas demeurer les bras croisés. Le Parlement doit respecter sa parole», a dit M. Beatty, rappelant que le plan de réduction de l'impôt des entreprises a été adopté aux Communes il y a deux ans.

«C'est une question de confiance. Les entreprises vont retenir des investissements si elles ne savent pas quelles seront les règles du jeu», a ajouté M. Beatty, dont l'organisation représente quelque 192 entreprises canadiennes.

À partir du 1er janvier 2011, le gouvernement veut faire passer le taux d'imposition des entreprises de 18% à 16,5%, puis à 15% à compter du 1er janvier 2012. À terme, ces baisses d'impôt priveront le fisc fédéral de 6 milliards de dollars par année, selon les libéraux. Mais le ministère des Finances annonce pour sa part le chiffre de 4,5 milliards de dollars.

Cette question sera l'un des grands enjeux de la prochaine campagne électorale. Depuis la reprise des travaux parlementaires, au mois de septembre, les libéraux de Michael Ignatieff pressent le gouvernement Harper d'annuler cette mesure controversée. Ils soutiennent que le pays ne peut se permettre une telle réduction alors que le gouvernement fédéral nage en plein déficit.

Le déficit d'abord...

Hier, le critique libéral Scott Brison a rappelé à M. Beatty dans une lettre que le gouvernement fédéral doit éliminer le déficit avant de songer à réduire davantage les impôts. En 2009-2010, Ottawa a enregistré un déficit record de 55 milliards de dollars.

«Nous croyons - et nous espérons que les membres de la Chambre seront du même avis - que les Canadiens doivent vivre selon leurs moyens, et que cela vaut aussi pour le gouvernement fédéral. Il est irresponsable d'emprunter 6 milliards de dollars de plus par année, gonflant ainsi la dette record du Canada, pour abaisser un taux de l'impôt des sociétés qui, grâce à des décisions prises par d'anciens gouvernements libéraux, est déjà inférieur de 25% à celui des États-Unis et le deuxième plus faible à l'échelle du G7», écrit M. Brison.

Il a aussi rappelé que l'ancien gouvernement libéral avait réduit l'impôt sur le revenu et l'impôt des sociétés de 130 milliards de dollars tout en présentant des budgets équilibrés.

«En qualité d'ancien ministre du cabinet Mulroney, vous savez fort bien que les déficits constituent un problème épineux qui doit être réglé pour assurer la prospérité à long terme de notre économie et de la nation», ajoute M. Brison.

Le ministre des Finances, Jim Flaherty, prévoit rétablir l'équilibre budgétaire à compter de 2015-2016.

Entre-temps, le gouvernement aura ajouté quelque 170 milliards de dollars à la dette accumulée, qui atteindra dans cinq ans 626 milliards de dollars. Entre 2008 et 2015, les intérêts sur la dette passeront de 31 milliards de dollars par année à 38 milliards de dollars.