La valeur des contrats accordés à des firmes d'avocats et de notaires par le gouvernement fédéral a presque doublé depuis trois ans. Des contrats qu'Ottawa n'est pas obligé de divulguer et pour lesquels il n'a pas à lancer d'appels d'offres.

Des documents obtenus par La Presse grâce à la Loi sur l'accès à l'information démontrent en effet que, entre 2007 et 2010, la valeur des mandats confiés à des bureaux d'avocats et de notaires est passée d'un peu moins de 21,5 millions de dollars en 2007-2008 à près de 35 millions en 2009-2010. Ces sommes couvrent les services juridiques fournis au nom de la plupart des ministères, mais elles n'incluent pas les dossiers criminels.

Cette augmentation de 75% en trois ans est en partie attribuable aux sommes importantes versées à une firme américaine dans le cadre du conflit du bois d'oeuvre.

«Il faut souligner le fait que le ministère de la Justice a dû fournir, particulièrement dans les deux dernières années, les services juridiques appropriés pour affronter la crise financière», a précisé une porte-parole du ministère de la Justice, Carole Saindon. Selon elle, ces services touchaient la lutte contre la crise dans les secteurs automobile et forestier.

Au total, le gouvernement a dépensé à ce chapitre plus de 325 millions de dollars en 10 ans pour l'ensemble de ces services juridiques. De cette somme, la firme américaine Weil, Gotshal & Manges, qui a pignon sur rue à Washington, a facturé plus de 65 millions à Ottawa entre 2000 et 2009. C'est quatre fois plus que tous les contrats accordés à toutes les firmes du Québec réunies durant la même période.

La facturation de Weil, Gotshal & Manges a connu un bond particulièrement important entre 2007 et 2009. De 5 millions de dollars pour l'année financière 2007-2008, la valeur des contrats qui lui ont été confiés est passée l'année suivante à 10 millions.

«C'est attribuable à l'augmentation substantielle de la charge de travail découlant de deux processus d'arbitrage qui on eu lieu pendant l'année 2008-2009», a expliqué une porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Annie Bissonnette. Ces arbitrages touchent les conflits du bois d'oeuvre et la Commission canadienne du blé.

Appel d'offres?

Or, on ignore si les mandats confiés à cette firme ont fait l'objet d'un appel d'offres, tout comme ceux confiés à des firmes externes du Canada ou d'ailleurs. Le ministère de la Justice a refusé de répondre aux nombreuses questions qui lui ont été posées à ce sujet. «La sélection se fait le plus possible par appel d'offres», précise-t-on sur son site web. Mais lorsque les circonstances l'exigent, les fonctionnaires peuvent accorder un contrat de gré à gré à une firme ou à un juriste inscrit dans sa banque d'environ 400 noms.

Par ailleurs, ces contrats accordés par le ministère de la Justice ne sont pas non plus soumis à l'obligation de divulgation qui touche généralement tous les contrats de plus de 10 000$ accordés par le gouvernement fédéral. Cette divulgation prend la forme d'une liste trimestrielle, publiée sur le site web de chaque ministère ou organisme.

Avec la collaboration de William Leclerc