Conscient des retombées potentielles du vote tant au pays qu'à l'étranger, le gouvernement Harper a mené jusqu'à la fin une campagne tous azimuts afin que le Canada obtienne un des deux sièges non permanents au Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies.

Les 192 États membres doivent voter aujourd'hui pour combler ces deux sièges hautement convoités. Le Canada se frotte à l'Allemagne et au Portugal dans cette course.

Lundi, le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, a passé la journée à rencontrer des diplomates afin de les convaincre que le Canada mérite leur appui. M. Cannon était accompagné de son secrétaire d'État, Deepak Obhrai, et du ministre d'État responsable des Amériques, Peter Kent.

«Je crois que les choses s'alignent bien. Nous travaillons très fort. Ce n'est pas une campagne comme celles que nous connaissons au Canada. Il y a beaucoup de facteurs géopolitiques pour plusieurs pays dont il faut tenir compte pour gagner. Nous allons travailler jusqu'à la dernière minute en ne tenant absolument rien pour acquis», a affirmé M. Cannon, que La Presse a joint à New York.

Le Conseil de sécurité compte dix membres non permanents, qui n'ont pas droit de veto, contrairement aux cinq membres permanents (États-Unis, Russie, Chine, France et Grande-Bretagne).

Depuis la création de l'ONU, le Canada, septième pays donateur, a réussi dans chaque décennie à décrocher un siège au Conseil de sécurité pour un mandat de deux ans. S'il se fait damer le pion par l'Allemagne et le Portugal aujourd'hui, il s'agira de sa plus longue absence du Conseil de sécurité. La dernière fois qu'il y a obtenu un siège remonte à 1998.

Il faut 128 votes, soit les deux tiers des voix, pour être élu. En 1998, le Canada avait remporté 131 votes. Les pays élus entreront en fonction le 1er janvier 2011.

Vanter les qualités du pays

Durant les nombreuses rencontres qu'il a eues au cours des dernières semaines, M. Cannon a fait valoir la contribution du Canada non seulement à la guerre en Afghanistan, mais aussi à l'aide au développement dans ce pays ravagé par des décennies de guerre.

Il a également souligné le rôle du Canada en Haïti au lendemain du séisme qui y a fait plus de 200 000 morts au début de l'année et rappelé qu'il a doublé son aide à l'Afrique, comme il s'était engagé à le faire en tant que membre du G7.

«Je fais valoir les qualités du Canada, sa capacité de travailler en étroite collaboration avec les Nations unies. Le Canada répond toujours "présent" quand les Nations unies font appel à ses services», a dit M. Cannon.

Le fait que les deux autres candidats soient des pays européens joue en faveur du Canada dans certaines chancelleries. «Pour certains pays, c'est un facteur. Ils veulent s'assurer que l'Europe ne soit pas surreprésentée à la table du Conseil de sécurité. Mais pour d'autres, cela ne semble pas déterminant.»

Selon certains observateurs, l'Allemagne est assurée d'obtenir un siège. Le Canada se bat donc principalement contre le Portugal. S'il perd, le gouvernement Harper essuiera un revers diplomatique sans précédent. Ses adversaires n'hésiteront pas à se servir de cette défaite pour attaquer sa politique étrangère.

Siège mérité?

La campagne pour obtenir ce siège a provoqué de vifs échanges entre le gouvernement Harper et les partis de l'opposition. Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a le premier affirmé que le Canada ne mérite pas ce siège à cause des positions controversées des conservateurs en matière de lutte contre les changements climatiques et de défense des droits de la personne, notamment.

Le chef du Parti libéral, Michael Ignatieff, doute lui aussi que le Canada mérite ce siège et estime que, en cas d'échec, le gouvernement Harper devra en porter le blâme.

Signe de la nervosité du gouvernement Harper, le ministre Cannon a vertement critiqué les propos du chef libéral la semaine dernière durant une rencontre à huis clos avec des ambassadeurs, selon l'agence Reuters.

Le mois dernier, Stephen Harper a prononcé deux discours en trois jours devant l'ONU afin de s'assurer d'une victoire du Canada. Jusque-là, il n'y avait fait qu'un seul discours, en 2006.

Lundi, Lloyd Axworthy, ancien ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement de Jean Chrétien, a affirmé que le gouvernement Harper avait bien joué ses cartes.