Les ministres influents du gouvernement Harper promettent un retour à la civilité à la Chambre des communes. Les partis de l'opposition s'engagent aussi à tout faire pour que le Parlement fonctionne à partir d'aujourd'hui, jour de reprise des travaux parlementaires.

Mais cette promesse de collaborer risque de nouveau d'être un voeu pieu. Car les conservateurs, les libéraux, les bloquistes et les néo-démocrates savent que la session qui se met en branle les mènera plus tôt que tard vers de nouvelles élections.

Pas d'élections... à l'automne

Les stratèges de tous les partis écartent la tenue d'un scrutin fédéral à l'automne, à moins d'un spectaculaire accident de parcours. Mais à partir de 2011, toutes les options seront sur la table.

«Nous ne voulons pas d'élections générales à l'automne. Mais il est hors de question pour nous d'appuyer le prochain budget», a indiqué à La Presse un stratège libéral sous le couvert de l'anonymat.

Minoritaires aux Communes, les conservateurs devront obtenir l'aide d'un autre parti que le Parti libéral pour se maintenir au pouvoir au-delà du prochain budget, qui devrait être déposé en février ou en mars par le ministre des Finances, Jim Flaherty. Selon plusieurs observateurs, les chances que cela se produise sont plutôt minces.

D'autant plus que le prochain budget devrait contenir de nouvelles compressions budgétaires si le gouvernement Harper veut respecter sa promesse d'éliminer le déficit, qui atteindra 45 milliards en 2010-2011, d'ici quatre ans. En outre, le gouvernement Harper célébrera le deuxième anniversaire de sa réélection à la mi-octobre. La durée de vie moyenne d'un gouvernement minoritaire est de 18 mois.

Signe que les chefs se préparent à la prochaine bataille électorale, Stephen Harper et Michael Ignatieff entendent sillonner le pays au cours de l'automne. M. Harper veut prendre le pouls des Canadiens sur les mesures à prendre pour soutenir la reprise économique. M Ignatieff veut prolonger la tournée pancanadienne qu'il a faite pendant l'été afin de consulter les Canadiens sur une foule de dossiers.

M. Harper sera aussi appelé pendant l'automne à voyager à l'étranger. Cette semaine, il doit d'ailleurs prononcer deux discours à l'ONU à New York. D'ici décembre, il devra participer à plusieurs sommets, dont le sommet du G20 à Séoul, en Corée du Sud, en novembre.

Dans l'intervalle, le gouvernement et les trois partis de l'opposition se livreront quelques parties de bras de fer où les tous les coups seront permis.

Plusieurs dossiers chauds

Dès mercredi, les conservateurs et les trois partis de l'opposition s'affronteront sur le sort du registre des armes à feu. Les députés seront appelés à voter sur une motion libérale visant à rejeter le projet de loi privé de la députée conservatrice Candice Hoeppner.

Ce projet de loi propose d'abolir l'obligation d'enregistrer les armes d'épaule, une promesse de longue date des conservateurs. Il avait pu être adopté en deuxième lecture en novembre dernier grâce à l'appui de huit députés libéraux et 12 députés néo-démocrates.

Mais au printemps, le chef libéral Michael Ignatieff a ordonné à ses troupes de voter contre toute mesure visant à affaiblir le registre. En outre, au moins la moitié des députés du NPD ont changé de camp au cours des derniers jours. Résultat: le vote s'annonce très serré, les partisans du maintien du registre ayant l'avantage d'un ou deux votes. S'ils perdent ce vote, les conservateurs n'auraient pas l'intention de revenir à la charge dans ce dossier avant le prochain scrutin.

Devant la reprise économique qui demeure fragile, les partis de l'opposition vont augmenter la pression sur le gouvernement Harper pour qu'il prolonge le programme de relance de 40 milliards de dollars sur deux ans. Ce plan, lancé en 2009, doit prendre fin le 31 mars 2011. Jusqu'ici, Stephen Harper et ses principaux ministres ont écarté l'idée d'injecter d'autres fonds publics pour soutenir la reprise.

Le ministre des Finances, Jim Flaherty, subira les pressions des partis de l'opposition pour qu'il renonce à augmenter les cotisations de l'assurance emploi à partir du 1er janvier. M. Flaherty doit confirmer cette hausse proposée par l'Office de financement de l'assurance emploi du Canada au plus tard en novembre afin de rétablir l'équilibre budgétaire dans la caisse de l'assurance emploi. La hausse serait de 15 cents pas tranche de 100$ gagnés pour les travailleurs, ce qui porterait les cotisations à 1,88$ par tranche de 100$ gagnés.

Le grand argentier du pays, qui doit faire une mise à jour de la situation économique et financière en octobre ou en novembre, sera aussi invité à annuler la nouvelle ronde de baisses d'impôts pour les entreprises qui doit entrer en vigueur en janvier 2011 et une autre en janvier 2012. Selon les libéraux, on ne peut se permettre d'offrir une telle réduction aux entreprises alors que le déficit est toujours aussi imposant. Ces baisses priveront Ottawa d'environ 6 milliards de dollars en revenus.

Le Bloc québécois entend profiter des propos contradictoires tenus par les membres du gouvernement Harper sur l'aide financière que pourrait apporter Ottawa à la construction d'un nouvel amphithéâtre à Québec. M. Harper et certains de ses ministres ont ouvert la porte à ce que le fédéral contribue au financement du projet avant de battre en retraite devant la levée de boucliers dans le reste du pays.