Le gouvernement du premier ministre Stephen Harper semble bafouer ses propres règles en matière de communications, affichées publiquement il y a quatre ans, en muselant les scientifiques fédéraux.

Le milieu scientifique canadien est en émoi à cause de nouvelles règles qui empêchent encore plus les chercheurs du gouvernement de parler de leurs travaux aux médias.

Pourtant, la règle numéro un établie par Ottawa en ce qui a trait aux communications gouvernementales, selon le secrétariat du Conseil du trésor, est de «fournir au public des renseignements opportuns, exacts, clairs, objectifs et complets sur ses politiques, programmes, services et initiatives».

Cette directive fait partie de la Politique de communication du gouvernement du Canada, affichée en août 2006 sur le site web du Conseil du trésor, quelques mois après l'arrivée au pouvoir des conservateurs.

La politique fédérale incite notamment les fonctionnaires à «discuter ouvertement» avec les Canadiens.

«Encourager les gestionnaires et les employés de la fonction publique à discuter ouvertement avec le public des politiques, des programmes, des services et des initiatives qu'ils connaissent et dont ils ont la responsabilité», est-il écrit sur le site web.

«L'ouverture du gouvernement favorise l'accessibilité et l'obligation de rendre compte. Elle permet au public de participer de façon éclairée à l'élaboration des politiques, assure la prise de décisions équitables et permet au public d'évaluer le rendement.»

Cette politique diffère de ce que le gouvernement met en pratique.

Des documents récemment obtenus par PostMedia News permettent d'apprendre que toutes les demandes faites par les médias au sujet des travaux des scientifiques à l'emploi du ministère fédéral des Ressources naturelles doivent désormais passer par des «experts en la matière» et le directeur des communications du ministère, «sans exception».

«Ce qui peut sembler une simple de demande de renseignements peut à vrai dire toucher une politique ou des questions de première importance», a un bureaucrate dans un courriel.

Il s'agit d'une situation avec laquelle les chercheurs de la fonction publique doivent vivre sur une base quotidienne. Et également d'une source d'irritation pour de nombreux travailleurs gouvernementaux.

«Cela préoccupe énormément les professionnels des services publics», a indiqué Gary Corbett, président de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada.

Selon John Stone, ancien scientifique fédéral aujourd'hui enseignant à l'Université Carleton à Ottawa, les risques de tension entre la recherche pure et les décisions politiques du gouvernement ont toujours existé.

Les chercheurs savent habituellement où se situe la limite, et «la plupart ne se mêlent pas des questions politiques parce qu'ils savent qu'ils n'en ont pas la compétence», a-t-il indiqué.