Fort de l'appui d'un député supplémentaire, le chef du NPD, Jack Layton, a interpellé le premier ministre Stephen Harper, hier, pour qu'il l'aide à trouver des solutions au problème du registre des armes à feu plutôt que de diviser la population à des fins électorales.

«Stephen, tu n'as pas les votes pour faire passer le projet de loi. Mais tu as le pouvoir de nous aider à corriger le registre et à renforcer le contrôle des armes à feu», a lancé M. Layton.

Une cinquième députée néo-démocrate, Carol Hugues, a annoncé hier matin qu'elle voterait contre le projet de loi C-391, mercredi prochain à la Chambre des communes. Cette initiative de la députée conservatrice Candice Hoeppner vise à exclure les armes d'épaule du registre canadien des armes à feu.

Avec ce nouvel appui et celui de Peter Stoffer, attendu lundi prochain, le NPD pourrait donc avoir suffisamment de votes pour permettre aux partis de l'opposition de tuer le projet de loi conservateur. Au total, 75 députés libéraux, 48 bloquistes et 30 néo-démocrates voteraient contre le projet de loi C-391, pour un total de 153, contre 152 conservateurs et 2 indépendants.

Cette semaine, cependant, plusieurs observateurs de la scène politique ont noté que cette défaite pourrait aider le Parti conservateur dans certaines circonscriptions rurales chaudement disputées aux néo-démocrates. Les chasseurs et les agriculteurs se sont en effet traditionnellement opposés à l'obligation d'enregistrer leurs fusils de chasse.

En point de presse, Jack Layton a appelé le premier ministre à mettre de côté les «jeux politiques néfastes» pour l'aider plutôt à «répondre aux préoccupations de longue date» des opposants au registre.

Le compromis proposé par le NPD, qui rejoint à plusieurs égards celui mis de l'avant par le Parti libéral il y a quelques mois, prévoit notamment l'abolition de la sanction criminelle pour ceux qui omettent d'enregistrer leur arme pour la première fois.

Mais le ton était moins conciliant chez les conservateurs, hier. Lors d'une conférence de presse avant celle de M. Layton, le nouveau leader du gouvernement à la Chambre des communes, John Baird, a dénoncé ce qu'il a décrit comme le fruit d'une manoeuvre des «élites de Toronto».

«Si nous faisons des promesses claires à nos électeurs et qu'ensuite nous cédons sous la pression des élites de Toronto, nous serons tenus responsables», a-t-il lancé. La flèche visait les députés du NPD et du Parti libéral qui avaient voté en faveur du projet de loi de Mme Hoeppner en deuxième lecture, mais qui ont changé de camp en vue du vote de la semaine prochaine.

Appel de Dawson

De leur côté, les enseignants et les élèves du collège Dawson ont ajouté hier leurs voix au concert de protestations suscité par l'éventuel démantèlement du registre des armes à feu.

La fusillade du 13 septembre 2006 est encore présente à l'esprit du personnel comme des élèves du collège. «Ici, on a été les premiers témoins de la violence que peuvent causer les armes à feu», rappelle Mary Hlywa, coordonnatrice du programme de service social du collège Dawson.

C'est de façon unanime, selon Mme Hlywa, que le personnel et les élèves demandent aux députés de la Chambre des communes de ne pas soutenir le projet de loi C-391. «Les armes longues sont les plus utilisées dans les crimes contre la police, la violence conjugale et les suicides. Il faut les contrôler», croit Mary Hlywa.

Le projet de loi conservateur est un «mouvement très agressif» contre les élèves de Dawson, croit Ariel Charney, de l'association des élèves (DSU). Ceux-ci comptent se rendre mercredi prochain sur la colline parlementaire. «On veut que le gouvernement Harper comprenne le message», dit Michaël Lessard, trésorier du DSU.

Créé après la tuerie de Polytechnique, le registre des armes à feu n'a pourtant pas réussi à éviter le drame de Dawson. «Les permis de conduire n'empêchent pas tous les accidents de la route, mais on n'élimine pas tous les permis pour autant», dit Fred Jones, président du syndicat des professeurs de Dawson (DTU).