Un milliard de dollars. Non, cette fois-ci, ce n'est pas le coût de la sécurité des sommets du G8 et du G20. C'est ce que pourrait coûter chaque année, et au seul gouvernement fédéral, une seule loi en matière de justice criminelle. Une somme qu'Ottawa conteste.

Le directeur parlementaire du budget, Kevin Page, a rendu publique mardi à Ottawa son évaluation de l'impact financier de l'entrée en vigueur de la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime (ex-projet de loi C-25), qui a été adoptée en octobre dernier, réduit l'importance du temps passé en détention avant le procès au moment de déterminer la peine de prison d'un délinquant.M. Page s'est penché sur ce dossier à la demande du député libéral Mark Holland. Il devait au départ chiffrer le coût d'une douzaine de ces projets de loi du gouvernement Harper en matière de loi et d'ordre. Mais le manque de transparence et de collaboration du ministère de la Sécurité publique et de Service correctionnel Canada, ainsi que l'ampleur de la tâche, l'ont finalement convaincu de se concentrer sur un seul de ces projets, a-t-il expliqué.

Néanmoins, les coûts évalués sont «significatifs», a martelé le directeur parlementaire du budget.

Pour le gouvernement fédéral, la nouvelle mesure impliquerait jusqu'à 1 milliard de dollars supplémentaires par année pendant les cinq prochaines années. Ce coût serait réduit à un peu plus de 600 millions par an si Ottawa décidait de ne pas construire de nouvelle prison, malgré le nombre accru de détenus que la loi y enverrait.

Quant aux provinces et territoires, ceux-ci pourraient voir la part de leurs dépenses au chapitre des services correctionnels passer de 49% à 56% de l'enveloppe totale à l'échelle canadienne. Kevin Page n'a pas voulu s'avancer sur le fardeau financier supplémentaire que cela représenterait puisque son mandat porte sur les opérations fédérales. «Les provinces et les territoires portent le fardeau du service correctionnel au Canada. Donc l'impact (pour eux) sera énorme», a-t-il toutefois prédit.

Le député libéral Mark Holland a pour sa part jugé que les provinces et territoires pourraient être appelés à payer au moins l'équivalent de ce que paie le fédéral, ce qui porterait le fardeau financier total à 10 milliards de dollars en cinq ans, tous gouvernements confondus. «C'est énorme et nous devons le rappeler: c'est un seul projet de loi», a-t-il lancé. Il a renchéri que le gouvernement Harper avait actuellement une douzaine de projets en matière de loi et d'ordre devant le Parlement.

Tant M. Holland que sa collègue du Bloc québécois Maria Mourani ont accusé le ministre de la Sécurité publique d'avoir présenté les coûts de la nouvelle loi de manière trompeuse aux parlementaires.

De 90 millions à 2 milliards

En avril dernier, le ministre Vic Toews avait affirmé que l'application de la nouvelle loi ne coûterait que 90 millions par année au fédéral. Quelques semaines plus tard, il a rectifié le tir: ces coûts s'élèveraient plutôt à 2 milliards de dollars en cinq ans.

Mardi, M. Toews s'en est tenu à cette dernière évaluation, avancée par Service correctionnel Canada. «Je n'ai rien vu qui changerait mon opinion à cet égard», a-t-il dit.

Quant aux chiffres avancés par Kevin Page, «je ne sais pas de qui il reçoit ses informations, a déclaré le ministre. Si vous me dites qu'il n'a pas reçu ses informations du Service correctionnel, il doit les inventer.»

 

>>> Pour joindre Hugo de Grandpré: hdegrand@lapresse.ca.