Pour la première fois, des proches ou des victimes des tueries de l'Université Concordia, du collège Dawson et de l'École polytechnique ont reçu ensemble la presse hier matin, au collège Dawson. D'une même voix, ils ont sommé Jack Layton d'imposer un vote de parti à ses députés néo-démocrates pour éviter que la portée du registre des armes à feu ne soit réduite.

Dès la semaine prochaine, les députés d'Ottawa pourraient être appelés à voter sur le projet de loi qui abolirait l'enregistrement des armes de chasse et effacerait du registre les données sur ce type d'arme.

Ceux qui ont vu la mort de près ou qui ont perdu des êtres chers ne l'acceptent pas.

«Il y a 20 ans, le 6 décembre 1989, cet homme qui croyait les femmes responsables de son malheur est entré dans mon école et dans ma classe, a raconté Nathalie Provost. Il a demandé aux hommes de sortir. Il a tiré sur mes collègues et moi, tuant mes amies et me blessant de quatre balles. Marc Lépine a utilisé un Ruger Mini-14, une arme d'épaule. Chaque jour, lorsque je me regarde dans le miroir, je me rappelle la capacité de destruction de cette arme. Cette arme, qui a tué 14 femmes et gravement blessé 13 autres victimes en moins de 30 minutes, ne serait plus enregistrée sous le projet de loi C-391.»

«Je suis le mari de Maryse Laganière, qui a perdu la vie le 6 décembre 1989 quelques mois après notre mariage, a dit Jeff Larivée. La Loi sur le contrôle des armes a été obtenue après six ans de travail par les étudiants et les familles des victimes de la tuerie de Poly. Elle est un monument à la mémoire de Maryse, tout comme à celle des autres femmes mortes. (...) Mais le registre des armes n'est plus seulement un symbole. (...) Je ne suis pas un expert en matière de sécurité, mais quand toutes les associations nationales de police témoignent de l'efficacité du registre à protéger le public, je crois sincèrement que le débat est clos.»

Et ils ont tous défilé, un après l'autre. Mark Hogben, fils du professeur Michael Hogben tué par Valery Fabrikant à l'Université Concordia en 1992. Hayder Kadhim, survivant de la fusillade du collège Dawson en 2006. Louise Hevey, mère d'Anastasia De Sousa, tuée par Kimveer Gill, et Benoît Laganière, qui était à Polytechnique le 6 décembre 1989. Souvent la gorge nouée, la voix chancelante.

Imposer la ligne de parti

Heidi Rathjen, survivante de la tuerie de l'École polytechnique, a rappelé que le Parti conservateur votera en bloc en faveur du projet de loi C-391. Le Bloc et les libéraux voteront au contraire pour le maintien du registre, par un vote de parti dans les deux cas. Mme Rathjen somme maintenant Jack Layton d'en faire autant.

Même s'il a été interpellé directement et visé personnellement par les victimes et proches de victimes de tueries, Jack Layton n'a pas fait de commentaires hier. C'est son bras droit, le député Thomas Mulcair, qui l'a fait.

«M. Layton a clairement fait savoir qu'il allait faire des approches auprès des 12 (députés) qui avaient voté la dernière fois (en deuxième lecture du projet de loi) contre le registre afin d'en réduire le nombre.»

«On sait compter, a-t-il poursuivi. On sait qu'à 12 (députés), il y aurait un fort risque que le registre tombe. On sait que le travail consiste donc à réduire considérablement ce nombre-là pour veiller à ce que le registre soit maintenu.»