Le premier ministre Stephen Harper entend combler le plus rapidement possible le poste laissé vacant par la démission non attendue du sénateur indépendant Michael Pittfield, annoncée hier pour des raisons de maladie. Un pas de plus vers la majorité des conservateurs au Sénat, cette démission a aussi pour effet de soulager... Jean Lapointe.

Le départ de M. Pittfield donne en quelque sorte l'égalité des voix aux sénateurs conservateurs par rapport au reste des membres de la Chambre haute, libéraux ou indépendants. En effet, une fois un remplaçant nommé pour le parlementaire de l'Ontario et originaire de Montréal, il y aura 52 sénateurs conservateurs, 48 libéraux et 4 indépendants - aucun n'ayant été nommé par Stephen Harper.

À moins d'une autre surprise, les conservateurs auront la majorité des sièges au Sénat le 29 novembre prochain, lors du départ obligatoire à la retraite du libéral Peter Stollery, un autre sénateur de l'Ontario. Il aura alors 75 ans.

Mais majorité ou non, le directeur des communications de Stephen Harper, Dimitri Soudas, a indiqué que son patron ne perdrait pas de temps pour nommer un nouveau sénateur. «J'assume que ce sera fait dans les plus brefs délais, mais ce n'est pas demain (aujourd'hui) ou après-demain (demain), à ce que je sache», a-t-il dit.

«Nous sommes minoritaires au Sénat et depuis que le Parlement est revenu, il n'y a pas un seul projet de loi, incluant le budget, qui a été adopté pour devenir loi par le Sénat», a-t-il dénoncé.

Lapointe soulagé

Concrètement, la démission d'hier est venue devancer d'environ une semaine la date à laquelle les troupes de Stephen Harper accéderont à cette majorité. Leur objectif devait initialement être atteint le 6 décembre, lors du départ à la retraite obligatoire d'un autre sénateur, le Québécois Jean Lapointe, qui aura alors 75 ans.

«Ça me soulage. Je n'aimais pas cela, donner la majorité aux conservateurs», a confié le chanteur et comédien à La Presse, hier.

M. Lapointe tirera sa révérence après une dizaine d'années passées au Sénat où il aura tenté, jusqu'ici en vain, de faire adopter un projet de loi sur les loteries vidéo, son principal cheval de bataille depuis sa nomination par Jean Chrétien en 2001.

Le sénateur libéral a introduit à plusieurs reprises ce projet qui vise à limiter les lieux où ces appareils peuvent être installés. Ses deux dernières tentatives ont été mises en échec par le déclenchement des dernières élections fédérales, en septembre 2008, et par la dernière prorogation du Parlement par Stephen Harper, en décembre 2009.

Depuis la reprise des travaux parlementaires, en mars dernier, Jean Lapointe n'a pas réintroduit sa proposition d'amendement du Code criminel. «C'était inutile, a-t-il expliqué. Les conservateurs sont tous contre et je n'avais aucune chance que ça passe.»

Il a préféré attendre que de possibles élections soient déclenchées avant son départ, et que les libéraux l'emportent. Mais encore là, le temps et les sondages n'ont rien pour lui donner espoir. «Parce que je m'en vais, je ne pourrai plus apporter aucun projet, a-t-il lancé. Je me sens inutile et je me sens impuissant.»