Les conservateurs, qui ont déjà prorogé le Parlement pendant deux mois plus tôt cette année, songent maintenant à étendre à la saison estivale les travaux portant sur une nouvelle loi sur le droit d'auteur.

Des sources au sein du gouvernement et de l'industrie ont confié à La Presse Canadienne qu'un nouveau projet de loi sur le droit d'auteur devrait être soumis à un comité extraordinaire de la Chambre des communes afin d'être étudié au courant de l'été, si l'opposition accepte cette possibilité.

Les modifications proposées à la Loi sur le droit d'auteur, qui est assez vétuste, devraient être présentées jeudi prochain, une date relativement tardive dans le calendrier parlementaire pour une pièce législative aussi importante.

Un comité conjoint du ministère du Patrimoine et d'Industrie Canada serait créé, et les partis de l'opposition seraient fortement invités à travailler avec le gouvernement pour finalement adopter la nouvelle loi.

Cette tentative, une suite logique du défunt projet de loi C-61 d'il y a deux ans, devrait calmer les partenaires internationaux - l'Union européenne et les États-Unis - et les gros joueurs de l'industrie culturelle, qui veulent des lois plus sévères pour protéger les droits d'auteur.

Une source au sein du gouvernement a indiqué que le Canada ne pouvait simplement plus ignorer le consensus international sur cet enjeu et accepter que les droits d'auteur soient bafoués, car les grandes entreprises du divertissement choisiront alors de ne plus investir au pays.

Cette source a précisé que cela ne signifie pas que les grandes entreprises ne ressentiront pas la pression de se plier aux exigences du consommateur.

«Ils devront peser cela très attentivement, même s'ils considèrent cela comme une victoire en terme de loi pour les droits d'auteur», a affirmé la source.

Mais cela laissera de côté les activistes de la consommation - encore une fois. La nouvelle loi considérerait encore comme criminel le fait d'utiliser un logiciel de cryptage afin de rendre une chanson, un film ou une technologie utilisable sur une autre plateforme que celle initialement prévue. Il serait illégal, par exemple, de décrypter une pièce musicale numérique présentant une protection pour les droits d'auteur et de la graver sur un disque compact.

Toutefois, de puissants opposants au projet de loi s'affairent déjà à préparer leur artillerie.

L'activiste en faveur de la démocratisation des droits d'auteur Michael Geist, de la Chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique de l'Université d'Ottawa, a de nouveau commencé à mobiliser ses partisans sur le web pour combattre cette nouvelle loi.

Cette semaine, la Fédération canadienne des étudiants et étudiantes a mis en ligne une vidéo sur le site YouTube expliquant les raisons pour lesquelles les étudiants devraient sonner la charge contre cette loi, qui serait selon eux discriminatoire puisqu'elle expose davantage les jeunes à des poursuites criminelles.

C'est d'ailleurs ce genre d'argument qui a permis aux consommateurs de jeter le projet de loi C-61 aux oubliettes la dernière fois.

Quoiqu'il en soit, la possibilité de modifier la Loi sur le droit d'auteur afin de permettre au Canada de rattraper la communauté internationale, particulièrement avec le traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, a frustré le gouvernement fédéral - libéral et conservateur - pendant plus d'une décennie.

Les modifications sont presque tout le temps contestées par un groupe de pression, et les ministres du Patrimoine et d'Industrie Canada se retrouvent presque toujours pris dans un débat entre la protection du consommateur et du secteur culturel. Il est quasiment impossible de tirer un avantage politique de cet enjeu, et en conséquence la volonté d'imposer de nouvelles mesures est souvent faible.

«Je ne voudrais pas être à la place du gouvernement, a commenté une source au sein du secteur de l'édition. Il n'y a pas beaucoup de gains à réaliser là-dedans.»