Le Nouveau Parti démocratique (NPD) accuse le ministre de la Défense, Peter MacKay, d'avoir leurré les Canadiens dans le dossier des prisonniers afghans et il réclame désormais sa tête.

Les troupes de Jack Layton disent en avoir assez du comportement du ministre, qu'ils jugent incohérent et trompeur.

Selon leur porte-parole en matière d'Affaires étrangères, Paul Dewar, il ne se passe pas une journée sans que ne surviennent de nouvelles révélations dans le dossier des prisonniers afghans venant contredire la version du ministre. Tromper le Parlement «est tout simplement inacceptable», a-t-il conclu, demandant désormais la démission de M. MacKay.

«Les ministres de ce gouvernement ont refusé de façon répétée d'accepter la responsabilité ministérielle. Cette tendance doit cesser maintenant», a-t-il insisté.

Les néo-démocrates disent avoir relevé au moins neuf contradictions mettant dans l'embarras le ministre. La dernière en règle, à leur avis, est un événement rappelé par le quotidien Globe and Mail lundi en référence à un événement qui s'est produit en juin 2006.

Un présumé taliban, sévèrement battu par la police afghane à coups de pieds, a dû être pris en charge par les soldats canadiens ayant constaté de leurs yeux cette violation de la Convention de Genève.

Un rapport approuvé par le brigadier général d'alors, Joseph Deschamps, indique que ce prisonnier avait bel et bien été capturé et transféré par les Forces canadiennes.

En comité parlementaire mardi, le Chef d'état-major, le général Walt Natynczyk a cependant affirmé que s'il est vrai que l'armée canadienne avait interrogé le suspect, elle l'a cependant relâché par la suite. C'est à ce moment que la police afghane lui aurait mis le grappin dessus, a-t-il soutenu. Cette version viendrait corroborer celle du ministre.

Ex-ambassadeurs

La sortie des néo-démocrates survient le jour même où plus d'une vingtaine d'anciens ambassadeurs du Canada se portent à la défense de Richard Colvin, ce diplomate qui soutient avoir averti ses supérieurs à maintes reprises, sans être pris au sérieux, que des prisonniers afghans transférés par les soldats canadiens avaient été torturés en Afghanistan.

Dans une lettre qu'ils ont fait parvenir à certains médias, les ex-ambassadeurs estiment que «l'affaire Colvin risque de créer un climat au sein duquel les agents pourraient être enclins à rapporter ce que la centrale veut recevoir plutôt que des perceptions et des faits qu'elle juge inappropriés».

Les signataires affirment en outre que le traitement qu'a réservé le gouvernement conservateur au diplomate Richard Colvin menace la survie du lien de confiance qui permet au corps diplomatique de rendre compte de ce qu'il voit et entend sur le terrain.

Depuis son témoignage le 18 novembre, M. Colvin a subi plusieurs attaques du camp conservateur faisant valoir que les rapports de M. Colvin n'étaient basés que sur des ouï-dire colportés par des talibans entraînés à mentir.

La lettre ouverte des ex-diplomates n'a pas manqué d'être évoquée par les partis d'opposition à la période de question aux Communes mardi.

«Quand ce gouvernement cessera-t-il de mépriser les fonctionnaires qui essaient de faire leur travail et quand cessera-t-il d'intimider les Canadiens qui essaient de dire la vérité sur cette question de torture?», a demandé le chef libéral Michael Ignatieff.

Le ministre MacKay a de son côté répété que ce n'était pas la crédibilité de l'individu qu'il a mis en doute, mais celle de sa preuve.

«Nous continuons de faire des améliorations aux droits humains en Afghanistan. Nous avons hérité d'un arrangement défaillant pour le transfert (des prisonniers), nous avons amélioré ça», a-t-il lancé.

Contrairement aux néo-démocrates, cependant, les libéraux et les bloquistes ne demandent pas la démission du ministre MacKay.

«(Les conservateurs) ont remplacé (Gordon) O'Connor, ça n'a rien donné. S'ils remplaçaient MacKay par je ne sais qui, ça donnera pas plus. C'est le gouvernement dans son ensemble qui a une attitude inacceptable», a soutenu le chef bloquiste Gilles Duceppe.

L'ancien ministre à la Défense, Gordon O'Connor, a perdu son poste dans la controverse, au mois d'août 2007, après avoir livré des informations contradictoires dans le dossier du transfert des prisonniers afghans.