À la veille d'un vote aux Communes sur le registre des armes à feu, ceux qui prônent le contrôle de ces armes remontent aux barricades.

Le directeur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a enjoint mardi les députés fédéraux de rejeter le projet de loi privé d'une députée conservatrice manitobaine. Son appel s'ajoute à celui de la mère d'une des victimes de la tuerie de Polytechnique qui a publié une lettre ouverte dans les journaux de mardi pour plaider la même cause.

Le projet de loi de la conservatrice Candice Hoeppner vise à éliminer l'enregistrement des armes d'épaule. Comme il s'agit d'un projet de loi privé, les chefs libéral et néo-démocrate permettront à leurs députés de prendre position comme ils l'entendent. Il suffirait d'une dizaine de votes du côté de l'opposition, mercredi, pour que le projet de loi continue à cheminer et passe à l'étape du comité parlementaire, se rapprochant ainsi d'une éventuelle adoption.

La députée Hoeppner estimait, mardi, avoir récolté l'appui d'au moins huit libéraux et néo-démocrates.

Dans sa lettre ouverte, Suzanne Laplante-Edward, qui a perdu sa fille Anne-Marie en 1989, rappelle au chef néo-démocrate Jack Layton et au chef libéral Michael Ignatieff qu'ils lui ont tous deux promis d'empêcher les conservateurs d'abolir le registre. C'était le 22 avril dernier, au moment de l'adoption au Parlement d'une motion en faveur du maintien de ce registre.

«M. Ignatieff et M. Layton (...) m'ont assuré personnellement qu'ils empêcheraient Stephen Harper d'arriver à son but», leur reproche-t-elle dans la missive.

Pourtant, le chef néo-démocrate n'a pas l'intention d'imposer la ligne de parti lors du vote. Pour se justifier, M. Layton dit que c'est la tradition qui l'empêche de forcer ses députés à voter contre l'abolition du registre.

«C'est un projet de loi d'un membre privé. Alors, c'est la tradition à la Chambre que chaque député prenne sa propre décision. C'est une tradition de longue date», a-t-il fait valoir.

Ce sera la même approche chez les libéraux. Michael Ignatieff n'a pas voulu s'expliquer mais son critique à la justice, Dominic LeBlanc, croit qu'il est inutile de s'inquiéter tout de suite.

«Faut pas faire une crise avant le moment, là. Demain (mercredi) soir ce n'est pas le vote final. (...) J'ai vu à plusieurs reprises des projets de loi privés aller en comité et ne pas se faire adopter à la fin», a-t-il plaidé à sa sortie de la période des questions, mardi après-midi.

Le directeur du SPVM, Yvan Delorme, lui, s'inquiète déjà. Dans un communiqué de presse publié mardi, il affirme que le maintien tel quel du registre des armes à feu est «essentiel». Et il cite cet exemple: «Peu après la fusillade survenue au Collège Dawson en septembre 2007, les policiers ont eu vent de menaces proférées par un autre individu. Le registre leur a permis de savoir que cet individu possédait plusieurs armes qu'ils ont pu lui confisquer avant qu'il ne passe aux actes.»

A M. Delorme et à Mme Laplante-Edward, le ministre conservateur Jean-Pierre Blackburn répond qu'il faut abolir le registre parce que «nous, on veut arrêter de tanner les chasseurs».

Son collègue des Travaux publics, Christian Paradis, rejette lui aussi les arguments du policier montréalais. «Il peut avoir son opinion. (...) Moi, de toute façon mon idée est faite et je vais clairement voter pour l'abolition de ce registre-là», a-t-il soutenu.