Au moment où les allégations de torture de prisonniers afghans transférés aux autorités par les soldats canadiens font l'objet de questions quotidiennes aux Communes, le Bloc québécois s'est opposé à une motion libérale qui réclamait que le comité parlementaire de la défense nationale enquête sur cette affaire.

Selon le Bloc, il serait plus approprié que la question soit étudiée devant le Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan, puisque le comité de la défense se penche actuellement sur un autre dossier qu'il aurait fallu mettre de côté le temps d'enquêter sur les transferts de détenus afghans.

«M. Dosanjh (Ujjal, le critique du Parti libéral en matière de défense), à mon point de vue, a mal géré le débat. Il l'a déposée (sa motion) au mauvais comité et sa motion a été défaite», a expliqué le porte-parole bloquiste en la matière, Claude Bachand.

La semaine dernière, l'ancien diplomate canadien Richard Colvin a révélé, dans le cadre des audiences de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire (CEPPM), avoir envoyé 16 rapports aux autorités canadiennes faisant état de cas de torture de prisonniers afghans, et ce, dès 2006.

M. Colvin aurait prévenu plus de 70 personnes, au ministère des Affaires étrangères, à celui de la Défense, ainsi que des hauts dirigeants de l'armée en poste à Kandahar et à Ottawa, qu'il y avait des problèmes «sérieux» et «alarmants» quant au traitement des prisonniers transférés aux autorités afghanes par les Canadiens.

L'opposition tente depuis de savoir si le ministre des Affaires étrangères de l'époque, Peter MacKay (aujourd'hui à la Défense nationale), et le premier ministre Stephen Harper étaient au courant.

M. Dosanjh réclamait donc au comité de la défense qu'il se penche sur ces allégations, afin de découvrir si le gouvernement a dès lors tenté de les faire confirmer et, si elles se sont avérées, s'il a tenté de corriger la situation.

«Il semble qu'ils ne veulent pas d'une enquête aussi large que celle que nous voulions entamer devant le comité», a reproché M. Dosanjh aux bloquistes, à sa sortie des Communes. Sa motion avait besoin de l'appui unanime des députés de l'opposition pour être étudiée.

Et même si la réunion du comité de la défense s'est tenue à huis clos, mardi matin, M. Dosanjh a rapidement dénoncé sur son compte Twitter que sa motion avait été rejetée par le Bloc. Il s'agit d'ailleurs d'une infraction aux règles parlementaires qu'il s'est par la suite fait reprocher.

Mercredi, le Bloc aura à son tour l'occasion de discuter de sa propre motion, devant le comité spécial sur la mission en Afghanistan. Le Bloc appelle dans ce cas le comité à étudier «la mise en application des lois, des règles et des procédures en ce qui concerne le transfert des détenus afghans».

Mais ce libellé est trop étroit, selon M. Dosanjh.

«Je crois que cette question est beaucoup plus importante que de simplement évaluer des lois et des procédures. Il s'agit de savoir si le gouvernement et les hauts gradés du gouvernement étaient au courant, ou pas, des allégations de torture qui ont été rapportées par M. Colvin, et quelles actions ils ont entreprises», a-t-il réitéré.

M. Bachand s'est néanmoins dit «très, très confiant» de la voir adoptée, laissant sous-entendre que ses pourparlers avec les autres partis allaient bon train.