Alors que le premier ministre Stephen Harper a laissé entendre, mercredi, que l'utilisation du logo du Parti conservateur sur un chèque du gouvernement par le député Gerald Keddy était un incident isolé, les libéraux ont relevé 181 cas jugés problématiques et ont déposé hier 48 plaintes contre des députés et des ministres.

«Nous pensons que ceci constitue probablement la plus vaste campagne de propagande jamais vue au niveau fédéral dans l'histoire du Canada», a plaidé le député libéral d'Ottawa-Sud, David McGuinty.

Selon lui, cette façon de faire est digne des pays émergents, où les lois et les codes de conduite ne sont pas aussi poussés qu'au Canada.

«Ce comportement rappelle ce que j'ai souvent vu en 10 années de travail dans les pays en développement, où la ligne entre le service public indépendant, le respect de l'argent des contribuables et la partisanerie politique est transgressée régulièrement, a dit M. McGuinty. C'est une façon de faire qu'on voit dans les États dirigés par un parti unique, lorsque le parti qui gouverne utilise les ressources publiques pour répondre à ses propres besoins.»

Les libéraux critiquent non seulement l'utilisation du logo du Parti conservateur sur des reproductions de chèques pour des investissements du gouvernement fédéral, mais aussi l'apposition au bas de ces reproductions de la signature du député ou du ministre qui en fait l'annonce. Outre les 48 plaintes déposées au commissaire fédéral à l'éthique, le Parti libéral songe à demander à Élections Canada d'enquêter afin de savoir si des contributions indues ont été faites au Parti conservateur à la suite de cet «effort massif de propagande».

Les libéraux entendent aussi réclamer une enquête de la vérificatrice générale sur ces pratiques et estiment que la Commission de la fonction publique devrait se pencher sur la «politisation du service public».

Harper lui-même

Sourire en coin, les deux libéraux ont mis au défi chacun des députés et ministres conservateurs de fournir eux-mêmes, de leur compte personnel ou de celui du parti, les fonds promis lorsqu'ils mettent leur propre nom sur un de ces immenses chèques promotionnels.

La signature du premier ministre Harper lui-même figurerait au bas de quatre chèques, selon la recension faite par les troupes libérales.

M. McGuinty n'a pas nié que les précédents gouvernements libéraux aient pu utiliser le même procédé, qui consiste à inscrire la signature du député de la circonscription sur des investissements fédéraux, mais a jugé que la nouvelle Loi sur la responsabilité, adoptée en grande pompe en 2006, empêche maintenant ces pratiques.

«Nous avons un nouveau code d'éthique, renforcé, a-t-il souligné. Tous les partis étaient d'accord. Les conservateurs font un détournement flagrant des nouvelles règles.»

Le bureau du premier ministre Harper condamne depuis deux jours l'utilisation du logo du Parti conservateur sur des chèques gouvernementaux, mais ne voit pas d'objection à ce que le nom du député concerné soit utilisé.