Ingérence ou coïncidence? Un nouveau logo de l'équipe canadienne pour les Jeux olympiques de Vancouver 2010, dévoilé jeudi, a fait des vagues jusqu'à Ottawa, dénoncé aussitôt par l'opposition.

La lettre C en noir avec au centre une feuille d'érable rouge, apposée sur des vêtements officiels, n'aurait probablement rien de controversé, si ce n'était de sa ressemblance frappante avec le logo du Parti conservateur du Canada.

À peine quelques heures après le dévoilement de la nouvelle collection de vêtements et accessoires, libéraux et néo-démocrates se sont relayés, à la sortie de la Chambre des communes, pour dénoncer ce qu'ils considèrent être une tentative des conservateurs d'utiliser les Jeux olympiques pour faire de la publicité partisane.

«N'importe quel citoyen au Canada se demanderait pourquoi les deux sont presque identiques. C'est un peu louche», a estimé le député libéral David McGuinty, qui réclame des explications au gouvernement.

«Essayer de politiser les Jeux olympiques au Canada, c'est jouer avec le feu, a dénoncé M. McGuinty. Ils (les conservateurs) le savent, mais ils sont tellement désespérés, ils sont allés tellement loin, ils sont tellement idéologiques.»

Les conservateurs ont aussitôt nié toute ingérence. «Je peux vous assurer que personne dans le gouvernement canadien n'a été impliqué d'aucune façon dans la conception des vêtements olympiques. La première fois que je les ai vus, c'est jeudi», a martelé le ministre d'État aux Sports, Gary Lunn.

Si le ministre concède qu'il y a des «similitudes» entre les deux logos, il réfute vivement les allégations de tentative de politisation des Jeux. «On devrait être fiers de nos athlètes, d'un bout à l'autre du pays. Il n'y a absolument rien de politique», a dit M. Lunn.

«On n'a rien à voir dans cette décision-là», a ajouté son collègue Christian Paradis, ministre des Travaux publics.

Mais aux yeux de l'opposition, la coïncidence semble invraisemblable. «Si le Parti conservateur n'avait rien à voir là-dedans, il poursuivrait en justice le Comité olympique pour contrefaçon», a estimé le député néo-démocrate Charlie Angus, qui n'hésite pas à qualifier l'incident de «honteux».

«C'est un logo du Parti conservateur. N'importe qui peut voir ça, a ajouté M. Angus. Si M. Lunn pense qu'il peut aller dans un Tim Hortons n'importe où au Canada et convaincre un amateur de hockey que ce n'est pas un logo du Parti conservateur, M. Lunn s'imagine que les Canadiens sont stupides. C'est de la petite politique partisane et je pense que les Canadiens et notre équipe olympique méritent mieux.»

Le ministre Lunn a d'emblée rejeté la possibilité de traîner les concepteurs du logo devant la justice.

Jointe à Vancouver, la responsable du motif controversé, designer en chef pour la Compagnie de la Baie d'Hudson, Suzanne Timmins, n'a pas caché son étonnement. «Je ne sais même pas de quoi a l'air le logo du Parti conservateur», a-t-elle répondu à La Presse, rejetant toute allégation d'ingérence politique dans le processus créatif.

«Le gouvernement n'a rien à voir là-dedans», a insisté Mme Timmins, concédant toutefois qu'elle ne connaît pas les allégeances politiques de son équipe de designers graphiques.

«Quand on utilise une feuille d'érable, il y a toujours quelqu'un pour trouver que les logos proposés ressemblent à Petro-Canada, à Air Canada ou à d'autres», a-t-elle expliqué.

Mme Timmins assure qu'avant qu'ils ne soient dévoilés au public, les trois motifs retenus pour la collection de vêtements et accessoires ont tous passé avec succès les vérifications du service du contentieux de la Compagnie de la Baie d'Hudson, qui doit s'assurer qu'aucune autre organisation ou personne n'en détient les droits.

Les articles officiels ont ensuite été présentés au Comité olympique canadien (COC) et à quelques athlètes. Dans tout le processus, personne, selon la designer en chef, n'a souligné qu'il pouvait y avoir une confusion entre le logo de l'équipe canadienne et celui du Parti conservateur.

«Il n'y a absolument aucun rapport, a pour sa part conclu Isabelle Hodge, gestionnaire des relations médias au COC, à propos des allégations d'ingérence politique. Ce sont des éléments de design qui ont été conçus pour compléter ou augmenter le logo de l'équipe olympique canadienne sur l'uniforme des équipes.» Mme Hodge s'étonne aussi du tollé soulevé à Ottawa.

Photomontage: PC

À gauche, le logo apparaissant sur les uniformes des athlètes canadiens. À droite, le logo du Parti conservateur du Canada