Le Parti libéral détient toujours une avance sur le Parti conservateur dans les intentions de vote, mais les troupes de Michael Ignatieff semblent avoir perdu leur élan des derniers mois après avoir brandi la menace de provoquer des élections estivales la semaine dernière.

C'est du moins ce que suggère le dernier sondage réalisé par la firme Nanos pour le compte de La Presse. Ce sondage a été réalisé du 17 au 21 juin, soit après que le chef libéral Michael Ignatieff eut menacé de renverser le gouvernement minoritaire de Stephen Harper aux Communes s'il ne se pliait pas à quatre conditions.

Si des élections avaient eu lieu aujourd'hui, le Parti libéral aurait obtenu 36,3% des votes - une chute d'un point de pourcentage par rapport au moins précédent - alors que le Parti conservateur en aurait récolté 32,2%, soit 0,4 point de pourcentage de plus qu'en mai. Le NPD aurait pour sa part recueilli l'appui de 16,8% des Canadiens, tandis que le Parti vert aurait obtenu 9,8% des voix.

Au Québec, le Bloc québécois a repris la tête dans les intentions de vote avec 38% comparativement à 35,4% au Parti libéral, 14% au Parti conservateur et 10,8% au NPD.

«Le dialogue entre Harper et Ignatieff a profité aux conservateurs en Ontario. Historiquement, les Ontariens sont davantage préoccupés par le ralentissement économique que les autres Canadiens. Mais l'attention qu'accorde Ignatieff à la question du programme d'assurance emploi a moins d'écho en Ontario que dans les autres régions, comme les provinces atlantiques ou le Québec», a souligné Nik Nanos, président de la firme qui porte son nom.

En Ontario, le Parti conservateur a vu ses appuis bondir de près de 10 points de pourcentage en un mois pour atteindre 42,4%, devançant ainsi le Parti libéral, qui obtient 40,9%. L'appui aux libéraux est demeuré stable dans la province la plus populeuse du pays, mais les troupes de Michael Ignatieff n'ont plus l'avance de 10 points qu'ils détenaient sur les conservateurs le mois dernier.

Étant donné que ses appuis sont concentrés dans la région de Toronto, le Parti libéral doit avoir une avance d'au moins cinq points dans les intentions de vote en Ontario pour remporter une majorité des 106 sièges que détient la province à la Chambre des communes. Le Parti conservateur a siphonné ses appuis principalement au NPD et au Parti vert en Ontario.

Michael Ignatieff avait menacé d'emboîter le pas au Bloc québécois et au NPD en votant contre les crédits budgétaires avant la fin de la session parlementaire si le gouvernement Harper ne répondait pas à ses demandes. Ce geste aurait provoqué des élections le 27 juillet.

Le chef libéral exigeait que le gouvernement conservateur dévoile avant les vacances estivales la réforme du programme d'assurance emploi qu'il envisageait ; qu'il détaille les dépenses réalisées dans les projets d'infrastructures ; qu'il précise le plan d'Ottawa pour pallier la pénurie d'isotopes médicaux, et qu'il indique comment le gouvernement comptait rétablir l'équilibre budgétaire.

Après trois rencontres avec le premier ministre Harper, le chef libéral n'a obtenu que la création d'un comité bipartisan qui étudiera pendant l'été les réformes possibles du régime d'assurance emploi. Ce comité devra soumettre un rapport au plus tard le 28 septembre. Le Parti libéral a aussi obtenu une journée de l'opposition aux Communes deux jours après le dépôt de ce rapport. Les libéraux pourront donc profiter de cette journée pour déposer une motion de censure envers le gouvernement Harper et forcer la tenue d'élections fédérales le 9 novembre.

Cela dit, Stephen Harper doit tout de même profiter de l'été pour redorer son blason auprès des électeurs. En effet, les Canadiens sont plus susceptibles d'avoir une image négative du premier ministre que du chef libéral. Seulement 27% des Canadiens disent avoir une impression positive ou plutôt positive de M. Harper, alors que 41,9% soutiennent le contraire.

Dans le cas de Michael Ignatieff, près de la moitié des Canadiens ne savent que penser du chef libéral ou disent avoir une impression neutre de lui. Par contre, 27,8% des répondants ont une impression positive ou plutôt positive de M. Ignatieff, alors que 22,6% disent le contraire.

«Il est évident que les conservateurs doivent rebâtir l'image de Stephen Harper, en particulier au Québec. Mais les libéraux doivent pour leur part s'atteler à la tâche de définir qui est Michael Ignatieff. Beaucoup de gens ignorent qui il est», a noté Nik Nanos.

Ce sondage a été réalisé auprès de 1004 Canadiens. Il comporte une marge d'erreur de 3,1%, 19 fois sur 20. Toutefois, la marge d'erreur est plus élevée dans le cas des résultats régionaux (plus ou moins 6,2% au Québec ; plus ou moins 5,7% en Ontario).