Le premier ministre Stephen Harper a annoncé dimanche qu'il comptait présenter un projet de loi afin de permettre aux victimes d'intenter des poursuites judiciaires contre les terroristes devant les tribunaux canadiens.

Le premier ministre en a fait l'annonce lors de l'assemblée plénière du Congrès juif canadien qui lui a décerné le prix Saul Hayes pour la défense des droits de la personne.

M. Harper a affirmé que cette mesure législative permettrait aux victimes d'obtenir justice contre les personnes, les organisations et les États étrangers appuyant le terrorisme. Selon lui, cela enverrait un message clair aux terroristes et à leurs commanditaires: le Canada les tient juridiquement responsables de leurs actes.

Il a affirmé qu'il donnera des précisions sur ce projet de loi lorsque celui-ci sera présenté cette semaine.

L'avocat de Toronto Aaron Blumenfeld, qui oeuvre au sein de la Canadian Coalition Against Terror, a affirmé que les familles des victimes canadiennes d'attaques terroristes réclament depuis longtemps une telle loi.

La coalition dont il fait partie avait présenté un projet de loi d'initiative privée aux Communes en 2005 pour demander au Parlement d'amender la Loi sur l'immunité des États. Elle souhaitait ainsi que la loi puisse s'appliquer aux individus, aux organisations et aux États finançant ou soutenant des groupes terroristes reconnus comme tels par le gouvernement canadien.

La tentative a été vaine.

Me Blumenfeld a noté que les États-Unis ont modifié leur législation au milieu des années 1990 pour permettre aux victimes américaines d'intenter de telles poursuites.

L'une de ces poursuites concerne le rôle du gouvernement de la Libye dans le bombardement du vol 103 de Pan Am au-dessus de Lockerbie, en Écosse. Les 243 passagers et 16 membres de l'équipage avaient été tués dans cette attaque, en plus de onze personnes au sol.

«La Libye est une histoire à succès. Je ne dirais pas que c'est la solution principale au terrorisme, mais c'est une partie d'une stratégie à multiples facettes», a affirmé Me Blumenfeld.

Le chef du Parti libéral du Canada, Michael Ignatieff, qui a pris la parole après M. Harper à l'événement du Congrès juif canadien mais qui n'était pas présent pour son allocution, a exprimé son appui au projet de loi. M. Ignatieff a souligné que le député libéral Irwin Cotler, un ancien ministre de la Justice, avait travaillé au cours des deux dernières années à des recours en droit civil pour les victimes du terrorisme.

«Je remarque ce matin (dimanche) que le premier ministre a posé un geste, qui, si vous me permettez, n'aurait pas pu être possible sans le travail de préparation d'Irwin Cotler», a fait valoir le chef libéral, dans le cadre d'un discours enflammé sur les droits de l'État d'Israël.

«Mon parti ne prétendra jamais être l'unique véritable défenseur d'Israël dans le milieu politique canadien, car je ne veux pas que mon parti soit seul dans la défense d'Israël, je veux que tous les partis défendent Israël», a-t-il déclaré.

Un professeur de droit à l'université York, James Morton, présent à l'assemblée, a quant à lui affirmé que ce projet de loi soulevait beaucoup de questions. Selon lui, si adoptée, une telle loi apporterait un énorme changement dans les relations entre le Canada et les autres pays. Il s'est aussi interrogé sur le bien-fondé des poursuites judiciaires entre pays, citant l'exemple des États-Unis et de l'Irak ou du Royaume-Uni et de l'Irlande.

Le chef du NPD, Jack Layton, et le vice-premier ministre d'Israël, Silvan Shalom, figuraient aussi parmi les invités de la 29e Assemblée plénière du Congrès juif canadien.