Le gouvernement Harper ne semble pas avoir l'intention de revenir sur sa décision d'abolir le registre des armes d'épaules, en dépit des remontrances de l'une des victimes du tireur fou du Collège Dawson et malgré les critiques des trois partis d'opposition aux Communes.

Le ministre fédéral de la Sécurité publique, Peter Van Loan, a défendu jeudi le bilan de son gouvernement en matière de lutte contre le crime et répété que le registre, créé par les libéraux dans les années 1990, constituait un gaspillage de fonds publics et un tracas inutile pour les chasseurs et les agriculteurs possédant des armes légales.

Cet argument ne convainc pas Hayder Kadhim, ce jeune homme qui a été atteint de trois projectiles lorsque Kimveer Gill a fait irruption et ouvert le feu, le 13 septembre 2006, dans son cégep. Une jeune femme, Anastasia De Sousa a été tuée et 19 autres étudiants ont été blessés, dont huit gravement, avant que Gill ne retourne une de ses trois armes à feu contre lui-même.

Dans une lettre ouverte au premier ministre Harper, M. Kadhim a dénoncé jeudi le discours voulant que ce ne soient pas les armes à feu qui tuent des gens mais bien des gens qui tuent d'autres personnes. Il a fait valoir qu'un tueur sans arme à feu avait une bien moindre chance de tuer autant de personnes qu'un criminel armé.

«Notre gouvernement est appuyé par un lobby d'armes à feu. C'est clair que notre gouvernement veut plaire à ce lobby. C'est dommage parce que c'est irrespectueux envers les victimes d'armes à feu, la famille des victimes, tous les gens qui luttent contre un meilleur contrôle des armes à feu», a-t-il soutenu.

Hayder Kadhim souligne qu'il doit toujours vivre avec une balle dans le cou et les fragments d'une autre balle dans la tête, que les médecins n'ont pu lui enlever. Bien qu'il souffre toujours psychologiquement et physiquement de la fusillade, il ajoute qu'il est encore plus blessé par la position des conservateurs qui affaiblira le contrôle des armes à feu.

Il demande également à Stephen Harper et aux conservateurs d'imaginer comment ils se sentiraient si un de leurs proches était victime de violence avec une arme à feu.

Devant l'absence de réponse du premier ministre, qui a ignoré une première lettre de sa part à ce sujet, il demande aux partis d'opposition, majoritaires, de s'élever unanimement contre l'affaiblissement du contrôle des armes à feu.

La position du Bloc québécois sur cet enjeu est sans équivoque. Le parti de Gilles Duceppe est en effet fermement opposé au démantèlement du registre, tout comme le sont les associations de police du pays.

Les libéraux et les néo-démocrates sont traditionnellement plus divisés. La porte-parole libérale en matière de Justice, Marlene Jennings, a toutefois précisé que députés et sénateurs de son parti uniraient leurs efforts pour stopper l'initiative conservatrice cette fois-ci.

Les membres de la Chambre haute seront les premiers à se prononcer, puisque le gouvernement a choisi de présenter son projet de loi au Sénat.

Par ailleurs, un autre projet de loi sur le même sujet émanant du député conservateur Gary Breitkreuz est devant la Chambre des communes.

«J'appellerai M. Kadhim pour lui dire d'emblée qu'il n'a pas à s'inquiéter. Le chef de notre parti a déclaré publiquement que les libéraux n'appuient pas, ni l'un ni l'autre de ces projets de loi qui visent à abolir le registre des armes à feu et que les libéraux vont s'assurer que ni l'un ni l'autre de ces projets de loi soient adoptés», a déclaré Mme Jennings à l'issue de la période des questions.