Les velléités protectionnistes sont loin d'être éteintes dans la capitale américaine, malgré les propos rassurants du président des États-Unis, Barack Obama.

Quatre députés du Bloc québécois, en mission à Washington hier, ont pu constater que les élus du Congrès américain, sous la pression de leurs électeurs, vont tout faire pour favoriser les entreprises américaines afin de stimuler leur économie dans le cadre du plan de relance de 787 milliards de dollars US adopté le mois dernier, même si cela risque de violer l'Accord de libre-échange nord-américain.

 

Le député bloquiste Claude Bachand et ses collègues Luc Malo, Carole Lavallée et Meili Faille, ont rencontré une douzaine de membres du Congrès en tout au cours de la journée afin de prendre leur pouls au sujet du protectionnisme, entre autres choses.

Et leur constat inquiétant est le même. Les élus américains affirment sans ambages que le plan de relance du Congrès doit servir à soutenir les entreprises américaines et créer des emplois aux États-Unis.

Dans une entrevue accordée hier à La Presse entre deux rencontres, Claude Bachand a soutenu que la situation est grave et que le premier ministre Stephen Harper doit effectuer à son tour une visite à Washington afin d'implorer avec vigueur les membres du Congrès à renoncer au protectionnisme.

«La tendance lourde, c'est qu'ils disent oui au protectionnisme. C'est très, très grave. Ils nous disent tous qu'ils sont des libres-échangistes. Mais ils disent que 90% de leur électorat veut que les sommes dépensées pour relancer l'économie restent aux États-Unis. Et ils affirment qu'ils ne peuvent aller à contre-sens de cela» a affirmé M. Bachand.

«Il faut que le premier ministre enlève ses lunettes roses et qu'il s'en vienne à Washington le plus rapidement possible. Je fais ma part en rencontrant des élus, mais je ne peux pas rencontrer Barack Obama cet après-midi», a laissé tomber M. Bachand dans son langage coloré.

Les députés du Bloc québécois ont profité du congé parlementaire de cette semaine pour se rendre à Washington afin de sensibiliser les élus américains sur trois questions: les dangers du protectionnisme, les efforts pour assurer la sécurité à la frontière canado-américaine et les objectifs du mouvement souverainiste au Québec.

Le premier plan de relance adopté par la Chambre des représentants contenait une clause «Buy America» stipulant que les entreprises ayant des contrats pour des projets d'infrastructure devaient acheter le fer et l'acier entièrement aux États-Unis. Cette clause avait été critiquée par le Canada et l'Union européenne comme étant le début d'une guerre protectionniste qui pourrait annihiler les chances de reprise mondiale à court terme.

Mais dans la version finale du plan adoptée par le Congrès américain, cette clause a été amendée pour préciser que les autorités américaines encourageaient l'achat local tout en respectant les obligations internationales des États-Unis en matière de commerce.

Avant de faire sa première visite officielle au Canada, le 19 janvier, le président des États-Unis avait affirmé, dans une entrevue accordée au réseau CBC, que les Canadiens n'avaient pas à craindre les mesures contenues dans ce plan de relance, dont la clause dite «Buy America».

Barack Obama avait alors affirmé que les autorités américaines comptaient bien respecter leurs obligations internationales en matière de commerce, dont l'ALENA dans la mise en oeuvre de ce plan économique.

«Les Canadiens ne devraient pas s'inquiéter outre mesure. Si on examine l'histoire, l'un des choses les plus importantes dans une récession mondiale comme celle que nous traversons, c'est de s'assurer que chaque pays n'adopte pas des politiques protectionnistes. Cela risque de nuire encore plus au commerce international», avait affirmé le président américain.

Or, les députés du Bloc québécois affirment n'avoir entendu aucun écho aux propos rassurants du président de la part des élus américains qu'ils ont rencontrés au cours des dernières heures.

«C'est une bataille pour remonter la côte que nous devons livrer actuellement. Ils font une profession de foi envers le libre-échange, mais ils affirment tous que la crise est tellement grave aux États-Unis que les 800 milliards doivent servir uniquement les Américains», a dit M. Bachand.