Le chef du Parti libéral, Michael Ignatieff, estime que le gouvernement Harper risque de vider les coffres d'Ottawa - ce qui pourrait se traduire par des déficits pour plusieurs années à venir - s'il accorde des baisses d'impôts importantes à tous les contribuables dans son prochain budget.

Au terme d'une réunion de deux jours de son caucus en prévision de la rentrée parlementaire de lundi prochain, M. Ignatieff a de nouveau exprimé hier des réserves au sujet de la justesse d'offrir une telle réduction des impôts et des taxes qui profiterait à tout le monde, y compris la classe moyenne.

Le chef libéral a soutenu qu'il serait favorable à des baisses d'impôts ciblées, en particulier pour les plus démunis. Mais il juge essentiel que le gouvernement fédéral conserve ses capacités financières afin de pouvoir financer les programmes dont les Canadiens auront besoin. «Nous croyons que des réductions de taxes ciblées pour les plus vulnérables qui amélioreraient leur pouvoir d'achat seraient une bonne chose. Nous avons des inquiétudes au sujet des baisses d'impôts généralisées pour la classe moyenne parce que cela risque de plonger le pays en déficit permanent», a affirmé M. Ignatieff.

Le premier ministre Stephen Harper a indiqué à plusieurs reprises au cours des derniers jours qu'il compte incorporer dans le prochain budget des baisses d'impôts pour la classe moyenne. Cette réduction du fardeau fiscal fera partie du train de mesures visant à relancer l'économie canadienne, déjà en récession, selon la Banque du Canada. Ce budget, qui sera déposé le 27 janvier, confirmera le retour des déficits à Ottawa. Il pourrait friser les 40 milliards uniquement pour l'exercice financier 2009-2010.

«Ce n'est pas simplement un budget pour nous, maintenant. C'est un budget qui a des implications pour l'avenir, même pour nos enfants. Nous avons vécu la période des déficits. Les Canadiens sont allergiques aux déficits. Je suis en faveur d'un déficit temporaire, un déficit modeste. Mais je ne sais pas quels seront les choix de M. Harper. On va voir la semaine prochaine», a dit le chef libéral.

Cela dit, M. Ignatieff a tenu à préciser qu'il évaluera le budget dans son ensemble avant de décider si le Parti libéral l'appuiera, laissant ainsi la porte ouverte à ce que ses troupes ne s'opposent pas aux mesures budgétaires du gouvernement Harper uniquement parce qu'il y a des baisses d'impôts. «Ce n'est pas un seul élément du budget qui va tout déclencher. Un budget est un gros document. Il y a des centaines de milliards de dollars en dépenses. Nous allons avoir une vue d'ensemble. Mais ce qui est aussi important, selon le credo libéral, c'est la prudence fiscale.»

De passage à Halifax, hier, le premier ministre a accusé son adversaire libéral d'avoir fait volte-face sur la question des baisses d'impôts. Il a soutenu que M. Ignatieff avait demandé récemment des réductions d'impôts pour la classe moyenne. «M. Ignatieff a indiqué, il y a deux semaines, qu'il voulait un allègement fiscal pour la classe moyenne. Il y a une semaine, il a changé d'opinion. Quant à la crainte d'un déficit à long terme, c'est une préoccupation que partage le gouvernement du Canada. Il y a consensus au pays qu'il faut, avec nos partenaires du G20, nous engager dans des dépenses déficitaires importantes dès maintenant pour stimuler notre économie. Mais cela ne peut être permanent. Nous sommes tous d'accord là-dessus et nous sommes tous d'accord sur le fait que la classe moyenne doit aussi bénéficier de la relance de notre économie.»