Le gouvernement Couillard abolira au moins 1150 postes dans la fonction publique l'an prochain, notamment en ne remplaçant pas des fonctionnaires qui partent à la retraite. Il veut ainsi réduire de 2% la taille des effectifs dans les ministères et organismes.

Alors que les compressions et les hausses de tarifs sèment la grogne, le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, a cherché à démontrer que l'État se serre la ceinture lui aussi. « La machine gouvernementale va faire sa part », a-t-il soutenu en conférence de presse mardi. Il a fait sa sortie au lendemain d'une réunion du conseil des ministres qui a duré six heures.

Le gouvernement Couillard avait déjà annoncé un gel de l'ensemble des effectifs de l'État jusqu'à la fin mars 2016. Cette fois, il va plus loin en voulant réduire « d'au minimum 2% » les effectifs de la fonction publique. On parle ici des ministères et organismes seulement. Les réseaux de la santé et de l'Éducation sont exclus. Il y a près de 60 000 fonctionnaires au gouvernement.

Québec profitera des départs à la retraite pour atteindre son objectif. Environ 2000 fonctionnaires prennent leur retraite chaque année, selon le Conseil du trésor.

Dans le passé, le gouvernement Charest avait instauré une politique de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux. Au gouvernement Couillard, on fait valoir que l'annonce faite mardi est plus ambitieuse dans la mesure où elle vise une réduction globale des effectifs.

Les ministères et organismes devront également « identifier le nombre de contrats, de consultants et d'occasionnels à leur emploi ». Le gouvernement a pour objectif de « réduire de façon significative la dépendance contractuelle donnée à l'externe ». Des fonctions seront rapatriées à l'interne, tout en respectant l'idée de réduire la taille de l'État, a dit M. Coiteux.

Alors que les négociations dans les secteurs public et parapublic s'amorcent, Martin Coiteux a envoyé un signal aux syndicats. Il leur a demandé de contribuer à l'atteinte de l'équilibre budgétaire prévue l'an prochain. Il a rejeté avec force l'idée d'un report de cet échéancier. « Ça ne sert à rien d'en discuter parce qu'on ne le fera pas », a-t-il dit.

Il a demandé aux syndicats de tenir compte de l'état des finances publiques dans le cadre des négociations. Il n'a pas exclu un gel des salaires pour l'an prochain. Il a rappelé que Québec doit verser à la fin des présentes conventions collectives, le 31 mars, une augmentation de salaires de 1%, ce qui représente environ 388 millions selon lui. Pour verser cette somme tout en respectant la cible du déficit zéro, Québec « limitera d'autres facteurs pouvant contribuer à augmenter les dépenses de rémunération de manière à dégager des économies de 689 millions de dollars ». Le gel des effectifs contribuera à réaliser ces économies.

Martin Coiteux a annoncé d'autres mesures. Il prolonge la suspension des bonis au rendement pour les cadres des ministères et organismes et pour le personnel des cabinets ministériels. Il s'agit d'économies de 42 millions. Québec demande aux sociétés d'État d'identifier « des mesures dont les effets sont au moins comparables à ce qui est exigé de l'ensemble du personnel d'encadrement ». Il réclame aussi de leur part de réduire les budgets de commandite et de publicité. « Le gouvernement resserre les dépenses liées à ce poste budgétaire des sociétés d'État d'ici la fin de l'année au financement essentiel et jugé incontournable », indique-t-on.

Québec autorise pour cette année le remboursement de dépenses de fonction des cadres et des hautes directions « aux cas jugés incontournables » seulement. Il lance un chantier pour revoir les structures. Les premières décisions seront annoncées dans le prochain budget.

L'opposition dénonce l'austérité

Les partis de l'opposition ont dénoncé le programme d'austérité du gouvernement Couillard, mardi.

Le député du Parti québécois, Pierre Karl Péladeau, fait valoir que le ratio entre la dette du Québec et son produit intérieur brut (54%) est de loin inférieur à ceux observés ailleurs. En Grèce, par exemple, ce taux est de 175%, tandis qu'il est de 133% en Italie et à 129% au Portugal.

« Plusieurs experts, des économistes de renom, ont regardé ça et on dit que ça ne requiert pas un massacre à la tronçonneuse comme les mesures qui sont en train d'être prises par le gouvernement », a-t-il dénoncé.

Le député de Saint-Jérôme a par ailleurs mis en cause le rapport du vérificateur général, sur lequel s'appuie le gouvernement libéral pour justifier ses compressions. Ce rapport a eu pour effet de noircir le portrait des finances publiques, dit-il, car les 1,3 milliard destinés au Fond des générations étaient comptabilisés dans les dépenses du gouvernement.

« On peut se questionner sur le rapport qu'il a fait parce qu'il est instrumentalisé de façon systématique par le gouvernement Couillard qui, en Chambre, est en train de dire que c'est une catastrophe. »

Le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, reproche au gouvernement libéral d'avoir caché ses intentions aux Québécois lors de la dernière campagne électorale. Il note que Philippe Couillard a promis d'indexer les tarifs de garderie au niveau de l'inflation alors qu'il les a plutôt augmentés, parfois jusqu'à 20$ par jour, une fois au pouvoir.

« Ce qui va rester, dans trois ou quatre ans, lors de la prochaine élection, c'est le fait que M. Couillard a menti, que M. Couillard est un visage à deux faces », a dénoncé M. Legault.

- Avec la collaboration de Martin Croteau