Les femmes peuvent à la fois changer des couches et élever de futurs leaders de la société, a déclaré mercredi la ministre québécoise de la Justice, Stéphanie Vallée, en guise de réplique aux propos tenus récemment par son homologue fédéral, Peter MacKay.

En point de presse mercredi, la ministre, qui est également responsable de la Condition féminine, n'a pas apprécié les commentaires à répétition de M. MacKay, qu'elle juge «déplorables», en réservant un traitement différent aux hommes et aux femmes dans leur rôle parental.

La veille, La Presse Canadienne révélait qu'en mai le ministre fédéral de la Justice avait expédié un courriel aux employées du ministère qui sont mères, à l'occasion de la fête des Mères, pour les féliciter de réussir à accomplir leurs tâches professionnelles tout en devant effectuer les tâches domestiques à la maison et prodiguer les soins à leurs enfants, dont les changements de couches.

À l'occasion de la fête des Pères, dans son message aux employés masculins ayant des enfants, il a plutôt choisi cette fois de féliciter ces messieurs qui formaient «l'esprit et l'avenir de la prochaine génération de leaders», sans référence aux tâches moins nobles reliées au rôle parental.

La ministre Vallée, avocate de formation et mère de deux adolescents, a choisi de se donner en exemple pour montrer à M. MacKay que son raisonnement était bancal.

«J'ai deux adolescents et je fais l'aller-retour entre Maniwaki et Québec chaque semaine. Je pense que je suis une bonne mère et que je suis une professionnelle accomplie», a-t-elle commenté en marge de l'étude des crédits de son ministère.

«Une femme peut changer des couches et peut élever de futurs leaders. À la maison, j'en ai deux», a dit la ministre, en faisant référence à ses enfants.

Elle n'a pas voulu remettre en question la compétence de M. MacKay pour exercer ses fonctions de ministre de la Justice. «Il ne m'appartient pas de déterminer les compétences» de M. MacKay, a-t-elle dit, tout en rappelant qu'elle ne partageait pas ses opinions sur les femmes.

Récemment, Peter MacKay avait tenu d'autres propos jugés sexistes, en estimant que le lien particulier mère-enfant expliquait la faible proportion de femmes nommées à la magistrature canadienne.

Encore là, la ministre Vallée a inscrit son désaccord, en rappelant que plus de la moitié des membres du Barreau du Québec étaient des femmes et que celles-ci étaient nombreuses à poser leur candidature pour devenir juges dans les cours du Québec.

«Nous avons nommé quatre juges il y a deux semaines et trois d'entre eux étaient des femmes. Nous avons reçu plusieurs candidatures féminines», a relaté Mme Vallée.

«Nous sommes en 2014. Nous pouvons être professionnelles et avoir une famille et avoir des aspirations pour devenir juges. Le fait d'être parent ne nous empêche pas d'être compétentes sur le plan professionnel», a-t-elle ajouté.

Son homologue de l'Ontario, la Procureure générale Madeleine Meilleur, a elle aussi déploré, mercredi, les propos «malheureux» du ministre MacKay sur les femmes juges, «spécialement le jour où l'Ontario a élu une femme comme première ministre».

«Je trouve cela très malheureux d'avoir des commentaires comme ça en 2014, parce qu'on a des femmes très compétentes en Ontario et au Canada pour occuper les fonctions de juges. On le démontre ici en Ontario, parce que la juge en chef est une femme, et les deux juges adjoints sont des femmes», a indiqué Mme Meilleur, qui a conservé son poste de Procureure générale, mardi, lorsque la première ministre Kathleen Wynne a annoncé la composition de son cabinet, suite aux élections du 12 juin.