Malgré le dépôt d'un budget marqué par un resserrement des dépenses, le premier ministre Philippe Couillard est d'accord avec la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, qui affirme que la relance économique ne passe pas seulement par l'austérité.

Devant quelque 1200 personnes, lundi, dans le cadre de la Conférence de Montréal, Mme Lagarde a évoqué le débat quant à savoir si l'austérité était compatible avec la relance économique.

«Nous croyons que ce l'est, mais que ce n'est pas (une solution) exclusive et qu'il s'agit d'appliquer les bonnes mesures au bon moment», a affirmé la directrice générale du FMI.

M. Couillard, qui préfère évoquer la «responsabilité budgétaire» plutôt que l'austérité, a affirmé, au cours d'une mêlée de presse, qu'en dépit des importantes compressions, le budget déposé la semaine dernière par son gouvernement comportait aussi des mesures «créatives d'emplois», comme la relance du Plan Nord ainsi que la stratégie maritime.

«Uniquement la redéfinition du périmètre administratif et financier de l'État, ce n'est pas suffisant, a-t-il dit. Nous voulons redonner au Québec la liberté de choisir et d'agir.»

Le premier ministre, qui a également prononcé un discours, a rappelé que la simple rigueur budgétaire ne serait pas suffisante pour relancer l'économie québécoise si certaines «réformes nécessaires» - comme la révision de certains programmes - n'étaient pas mises de l'avant au cours des prochaines années.

Selon lui, le Québec - à l'instar d'une famille dont les dépenses dépassent les revenus - se devait de prendre des décisions «difficiles mais nécessaires».

«Des politiques sociales à crédit, au-delà de nos moyens réels, n'ont que l'apparence du progressisme, a dit M. Couillard. À 47 pour cent du produit intérieur brut, les dépenses publiques y prennent trop de place.»

Sans faire directement référence aux moyens que Québec entend mettre de l'avant au cours des prochaines années, la directrice générale du FMI a de son côté souligné la «clarté» ainsi que les ambitions du gouvernement Couillard.

«C'est un bonheur de vous entendre dire (...) que vous allez (...) simplifier les modalités d'action des entrepreneurs, a dit Mme Lagarde. C'est ça qui est indispensable.»

Faire attention aux pièges

Mme Lagarde, qui a reçu lundi un doctorat honoris causa de l'Université de Montréal, a également affirmé que la crise financière de 2007 était maintenant chose du passé, mais que l'économie mondiale devait éviter de tomber dans les pièges que représentent la «complaisance» et la «fatigue».

«Très clairement, le paysage économique a changé, les ressorts de la croissance sont différents et nous sommes tous (...) en train de réinventer les méthodes de la croissance (économique)», a dit Mme Lagarde, qui ne s'est pas adressée aux journalistes après son discours.

Néanmoins, la directrice générale du FMI estime que des dangers, par exemple la faible inflation - voire la déflation -, la volatilité des marchés émergents ainsi que les risques géopolitiques comme la situation en Ukraine, menacent toujours la vigueur de l'économie mondiale.

Mme Lagarde estime que la croissance économique mondiale - qui a été de trois pour cent l'an dernier - devrait atteindre 3,6 pour cent cette année et 3,9 pour cent l'année suivante.

Cette dernière a également suggéré que certaines puissances mondiales comme le Canada devraient taxer les émissions de gaz à effet de serre (GES) pour protéger l'environnement plutôt que d'attendre un traité qui remplacera le Protocole de Kyoto.

Selon Mme Lagarde, la réduction de la consommation d'énergies fossiles passe soit par une taxe sur le carbone ou l'instauration d'un système de plafonnement et d'échange de droits d'émission de GES.

Elle a expliqué que les pays ne peuvent plus ignorer le recours aux combustibles fossiles, les eaux usées ainsi que la pollution atmosphérique, qui ont entre autres des effets sur la santé de certaines personnes.

La directrice générale du FMI a rappelé que la Colombie-Britannique avait instauré avec succès un système de plafonnement et d'échange de droits d'émissions de gaz à effet de serre, ajoutant que cette façon de faire n'était probablement pas la seule.

«Je suis certaine qu'il y a d'autres bons systèmes», a-t-elle dit, faisant référence aux efforts du Québec dans ce dossier.

Mme Lagarde a aussi salué les efforts du Canada visant à développer son secteur énergétique, qui, selon elle, pourrait stimuler ses exportations vers l'Asie ainsi que l'Europe, rappelant que ces efforts ne devaient pas être faits au détriment de l'environnement.