Le Parti libéral et le Parti québécois doivent être sanctionnés à leur juste mesure pour avoir encaissé du financement illégal, estime Québec solidaire. Il déposera un projet de loi visant à permettre au Directeur général des élections (DGE) d'exiger des partis le remboursement de dons illégaux reçus au cours des 15 dernières années.

À l'heure actuelle, la Loi électorale prévoit un délai de prescription de cinq ans à compter de la date où une infraction est commise pour imposer des sanctions, comme exiger le remboursement d'un don illégal. Si la contribution a été versée il y a plus de cinq ans, le DGE n'a aucun recours.

Québec solidaire souhaite faire passer le délai à 15 ans. Il veut ainsi forcer le Parti québécois et le Parti libéral du Québec à rembourser les contributions illégales qui seraient découvertes par le DGE et qui auraient été obtenues depuis 1998, ce qui correspond à la période couverte par la commission Charbonneau.

En entrevue à La Presse au début du mois, le DGE, Jacques Drouin a reconnu que le délai de prescription de cinq ans restreint ses pouvoirs. Il a alors révélé que les employés de 532 entreprises et leurs proches ont versé près de 13 millions de dollars à des partis politiques - surtout au Parti libéral - entre 2006 et 2011.

Ces dons pourraient avoir été versés par l'entremise de prête-noms, ce qui est illégal. Or, les trois quarts de ces contributions ont été faites il y a plus de cinq ans. Le DGE n'a donc aucun pouvoir pour sanctionner la majeure partie du financement illégal qu'il pourrait confirmer.

La commission Charbonneau a elle aussi fait la lumière sur des dons illégaux qui remontent en bonne partie à plus de cinq ans. Elle a démontré que les employés de SNC-Lavalin ont versé, de 1998 à 2010, 570 000$ au PLQ et 477 000$ au PQ. Ils le faisaient en échange d'une prime de leur employeur, ce qui contrevient à la loi.

Le député de Québec solidaire Amir Khadir prévoit déposer son projet de loi cette semaine. Il a fait appel aux services juridiques de l'Assemblée nationale pour s'assurer que sa mesure est légale. Il a ainsi mis de côté l'idée de changer le délai de prescription pour intenter une poursuite pénale.

Amir Khadir rappelle qu'en 2006, le PQ et le PLQ ont accepté de rembourser des dons illégaux reçus au-delà du délai de prescription. Le rapport Moisan avait alors révélé que Groupaction - une firme mêlée au scandale des commandites - avait fait des contributions de 96 400$ au PQ et de 8325$ au PLQ entre 1995 et 2000. Les sommes aujourd'hui en cause sont évidemment beaucoup plus élevées.

La CAQ est d'accord

Avec son projet de loi, Amir Khadir veut mettre plus de pression sur le PQ et le PLQ. Il trouve paradoxal que les deux partis disent vouloir assainir les moeurs politiques, mais qu'ils se réfugient derrière le délai de prescription pour éviter d'être durement sanctionnés.

En mars, le PQ et le PLQ ont refusé d'appuyer une motion d'Amir Khadir leur demandant de s'engager à rembourser les dons illégaux reçus au cours des 15 dernières années. Ils rappelaient justement l'existence du délai de prescription. La Coalition avenir Québec a toutefois donné son appui à la motion.

Même s'ils ont tous deux rouvert la Loi électorale, entre autres pour abaisser le don maximum permis, le gouvernement Charest et le gouvernement Marois n'ont jamais remis en question le délai de prescription.