Au lendemain du Forum sur les redevances minières, l'industrie a reconnu que la plupart de ses membres accepteraient une augmentation de leur contribution, a appris La Presse, tout en lançant cette mise en garde: si le gouvernement péquiste leur demande plus de 40 millions additionnels par année, il sera puni pour sa gourmandise. Des investissements seraient annulés, des emplois seraient perdus et moins d'argent retournerait dans les coffres de l'État.

Du «chantage», selon Ugo Lapointe, de la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine. Chose certaine, le bras de fer se poursuit. Au ministère des Finances, on assure qu'on exigera davantage des sociétés minières. «Ce serait plus que 40 millions de dollars additionnels par année, c'est certain», dit l'attachée de presse du ministre Marceau, Mélanie Malenfant.

En même temps, au cabinet de M. Marceau, on insiste qu'il est réducteur de parler seulement en terme de chiffres. En modulant les paramètres, on peut établir une multitude de régimes, qui peuvent récolter la même somme avec différents impacts sur les entreprises minières.

L'année dernière, Québec a engrangé quelque 350 millions de dollars en redevances. La limite suggérée par l'industrie correspond à une hausse de moins de 10%.

La question est politiquement sensible. Dans son cadre financier de la dernière campagne électorale, le PQ prévoyait récolter 388 millions de dollars de plus par année, en moyenne, sur cinq ans, avec son nouveau régime hybride, soit le double du niveau actuel.

Dans le régime actuel, les redevances sont de 16% sur les profits. Le gouvernement péquiste veut que toutes les sociétés minières payent une redevance, et que l'État obtienne plus d'argent en cas de «rendements excédentaires», comme lors d'un boom minier. En campagne électorale, il promettait donc un régime de 5% sur la valeur brute, et un impôt supplémentaire de 30% sur le rendement excédentaire.

Québec doit trancher

Au Forum sur les redevances à la mi-mars, la polarisation des débats a confirmé qu'un consensus était impossible. Le gouvernement doit donc trancher. La décision doit être rendue bientôt. Le ministre Marceau promet encore un régime hybride, mais ne veut plus se prononcer sur un pourcentage de redevances.

Dans les dernières semaines, le patron de la société minière Iamgold a menacé d'abandonner l'expansion de la mine saguenéenne Niobec, un projet d'une valeur de 1 milliard, si le régime était punitif. Il en a particulièrement contre la taxe sur le rendement excédentaire.

«Quand on voulait syndiquer les travailleurs miniers, l'industrie menaçait aussi de fermer les mines, mais ça n'est jamais arrivé, bien sûr. On assiste aux mêmes tactiques de peur», réagit Ugo Lapointe.

L'industrie ne parle pas d'une seule voix. De plus petites entreprises minières et des explorateurs affirment en coulisse que les grandes sociétés minières pourraient payer quelques millions de plus sans trop souffrir, a-t-on appris. Mais ils craignent que la redevance sur la valeur brute menace le financement des jeunes mines, qui ont besoin de liquidités. Un risque qu'a confirmé la firme Dundee Marchés des capitaux dans une récente note envoyée à ses investisseurs. Certaines mines peuvent dépenser plus de 1 milliard avant de commencer à encaisser des profits. M. Marceau envisage de moduler ce taux en fonction du stade d'exploitation d'une mine, ou à le rendre progressif en fonction du revenu.

Selon nos informations, les sociétés minières jugent avoir eu une bonne écoute des fonctionnaires du ministère des Finances lors des récentes rencontres. Mais elles croient que c'est au bureau de la première ministre que se réglera ce dossier très sensible. Elles ont envoyé plusieurs lettres au cabinet de Mme Marois depuis le forum pour préciser qu'il ne s'agit pas de chantage, et que plusieurs projets miniers seraient en jeu.